Il fut un temps où la chasse était aux cartes graphiques hors de prix. Mais depuis quelques semaines, l’heure est désormais à la pénurie de RAM. Si vous aviez prévu d’améliorer votre PC récemment, vous avez sans doute remarqué les tarifs exorbitants des barrettes DDR4 et DDR5. Les kits DDR5-6000 CL30 de 32 Go, considérés comme le sweet spot pour le gaming, sont passés de 140 € en septembre à 265 € en novembre 2025.
Le marché vit une crise sans précédent. La cause principale ? L’appétit gargantuesque de l’intelligence artificielle. Les géants technologiques (Microsoft, NVIDIA, Meta, Amazon, Google, OpenAI) déploient massivement leurs infrastructures d’IA, absorbant une part colossale de la production mondiale de DRAM. Et le 3 décembre 2025, un acteur majeur a ajouté de l’huile sur le feu : Micron (le groupe derrière Crucial) a annoncé qu’il ne vendrait plus ses produits au grand public.
Crucial ne vous vendra plus de barrettes de RAM
Dans son communiqué publié le 3 décembre 2025, Micron a annoncé mettre fin à son activité grand public pour sa marque Crucial. Oui, la même Crucial qui équipait depuis près de 30 ans nos PC en RAM, SSD et kits fiables à prix corrects.
Micron ne s’en cache même plus : tout est sacrifié sur l’autel de l’intelligence artificielle. L’industrie vit une ruée vers l’or où chaque wafer compte, et les géants de l’IA absorbent absolument tout. La HBM (High Bandwidth Memory — ou mémoire à haute bande passante) utilisée dans les GPU et les accélérateurs d’IA les plus puissants du marché est le nouvel or numérique.
La priorité est totale aux clients stratégiques comme NVIDIA, Google, Microsoft ou Meta. Le particulier, lui, passe après… ou plutôt disparaît du tableau.
« La croissance des centres de données, alimentée par l’IA, a entraîné une forte augmentation de la demande en mémoire et en stockage. Micron a pris la difficile décision de se retirer de l’activité grand public de Crucial afin d’améliorer l’approvisionnement et le support pour ses clients stratégiques les plus importants dans les segments à forte croissance », a déclaré Sumit Sadana, vice-président exécutif et directeur commercial de Micron Technology.
Concrètement, les derniers stocks Crucial continueront d’arriver chez les revendeurs jusqu’en février 2026. Après ça, rideau : plus aucune nouvelle barrette, plus aucun nouveau SSD. Le support, lui, reste assuré pour les produits déjà vendus.
Une crise qui risque de durer plusieurs années
On pourrait croire qu’avec des prix déjà doublés ici et là, le plus dur a été passé. En réalité, on n’a fait qu’effleurer le début du problème. La simple anticipation de la pénurie a suffi à mettre le marché sous tension : certains revendeurs ont augmenté leurs commandes et les premiers scalpeurs flairent déjà la rareté pour gonfler les prix.
Ajoutons à cela désormais un acteur majeur comme Crucial qui se retire… et la mécanique des prix devrait s’emballer encore un peu plus. On perd un fabricant d’ampleur capable de tirer les prix vers le bas. Crucial vendait beaucoup, régulièrement, et souvent à des tarifs planchers. Dans une période de pénurie historique, c’est exactement l’inverse de ce qu’il fallait. Moins de concurrence, moins d’offre, plus de pression sur les prix : la RAM ne risque pas de redevenir accessible de sitôt.
Cette décision historique risque aussi de donner des idées à d’autres grands fabricants comme Kingston, Corsair ou G.Skill, qui pourraient être tentés de réduire leurs propres efforts sur le grand public si les marges de l’IA deviennent trop attractives.
Et même sans aller jusque-là, selon plusieurs dirigeants de l’industrie, dont le patron de TeamGroup, les prix contractuels de la DRAM et de la NAND ont déjà bondi de 80 à 100 % sur le seul mois de décembre 2025. Comme le relaie Digitimes, les stocks d’amortissement des distributeurs devraient être épuisés dès les premiers mois de 2026 — un timing qui coïncide, paradoxalement, avec la fin de la production grand public de Crucial. À partir de là, obtenir des allocations de DDR4 ou DDR5 pourrait devenir encore plus compliqué — même en payant le prix fort.
Quand acheter sa RAM ?
La solution la plus évidente serait d’aligner la demande mondiale sur la capacité réelle des fabricants, autrement dit, produire davantage. Mais pour y parvenir, il faudrait augmenter massivement les infrastructures de production — un processus long, lourd et impossible avant 2027, voire 2028, comme l’indique Gerry Chen, le directeur général de Team Group.
Nous ne sommes clairement pas dans le meilleur moment pour changer de PC ou améliorer son setup. Comme lors de la pénurie des GPU, la solution la plus logique serait d’attendre… mais on ne peut pas repousser indéfiniment une mise à niveau, surtout si le marché ne revient pas à la normale avant plusieurs années.
Dans ce contexte, l’option la plus pertinente aujourd’hui est souvent de se tourner vers un PC déjà monté. Sur ces configurations préassemblées, la hausse des prix des composants est généralement moins répercutée que sur les achats au détail, ce qui permet de limiter la casse.
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