Est-il trop simple d’aller dans l’espace ? Avec le développement de véhicules automatiques et l’explosion du tourisme spatial, devenir astronaute juste parce que l’on franchit la bonne altitude est devenu très accessible, pour peu que l’on soit assez riche. Aux USA, la FAA entend resserrer les conditions d’éligibilité pour obtenir ses ailes d’astronautes. De quoi inciter d’autres à revoir les critères actuels ?

Imaginez : vous avez le compte en banque suffisamment garni pour vous payer un billet pour un petit tour dans l’espace avec Virgin Galactic, Blue Origin ou même jusqu’à la Station spatiale internationale, grâce à SpaceX et Axiom Space. Vous vous offrez le vol de votre vie, restez quelques minutes, voire plusieurs jours dans l’espace et revenez indemne.

Ce n’est pas pour autant que vous recevrez forcément vos ailes d’astronaute. En clair, vous ne serez peut-être pas considéré comme un astronaute à part entière.

En tout cas, pas forcément aux États-Unis. Il apparait que l’administration de l’aviation civile américaines (FAA — Federal Aviation Administration) est en train de réviser les critères sur lesquels elle s’appuie pour déterminer qui peut obtenir le badge de la FAA. C’est ce qu’a relevé le site spécialisé Space News en parcourant la documentation récente de l’agence gouvernementale américaine.

Comme tous les astronautes, Thomas Pesquet doit partager certains éléments de sa combinaison. // Source : NASA–Robert Markowitz

Comme tous les astronautes, Thomas Pesquet doit partager certains éléments de sa combinaison.

Source : NASA–Robert Markowitz

Ainsi, trois critères sont demandés : satisfaire les exigences de qualification et de formation pour un vol habité ; dépasser l’altitude des 80 km (50 miles) au-dessus du niveau de la mer dans un véhicule homologué par la FAA ; et enfin, démontrer des activités pendant le vol qui étaient essentielles à la sécurité publique ou qui ont contribué à la sécurité des vols spatiaux habités.

Il s’avère que le troisième préalable est nouveau : on ne le retrouve pas dans des versions plus anciennes de la FAA. Toujours dans ce document, il est spécifié que ce type de mise à jour est décidé pour maintenir le prestige des ailes d’astronaute, à l’heure où on assiste à une montée en puissance du tourisme spatial, avec de richissimes individus capables de se payer un ticket pour vivre la micropesanteur.

Une décision qui n’engage que la FAA

La portée de la décision de la FAA s’arrête aux frontières américaine : en effet, il ne s’agit pas, par exemple, d’une décision venant de la Fédération aéronautique internationale (FAI). Dans les faits, les autres pays ont toute latitude pour définir leurs critères pour attribuer aux personnes dépassant une certaine altitude l’appellation d’astronaute.

C’est d’autant plus vrai que les États-Unis eux-mêmes ne définissent pas comme tout le monde la limite de l’espace. Par convention, le monde entier opte pour une altitude de 100 kilomètres, symbolisée par la ligne de Kármán. Outre-Atlantique, des raisons historiques et de choix dans les unités de mesure (les miles, plutôt que les kilomètres) font que le seuil de l’espace est à environ 80 km (50 miles).

Le resserrement des conditions d’admissibilité pour gagner les ailes d’astronaute de la FAA dans le cadre d’un vol commercial est justifié par la facilité croissante qu’il y a à se rendre dans l’espace. Le document, qui est daté du 20 juillet 2021, constitue d’ailleurs la première mise à jour des règles depuis 2004, date à laquelle la FAA a mis au point un badge destiné aux astronautes voyageant grâce à des groupes privés.

Jeff Bezos sort de la capsule après son voyage dans l'espace // Source : YouTube/Blue Origin

Jeff Bezos sort de la capsule après son voyage dans l'espace

Source : YouTube/Blue Origin

À Space News, la FAA a dit que « lorsque le programme a été créé en 2004, son objectif était de reconnaître les membres d’équipage de vol qui ont fait progresser la mission de la FAA pour promouvoir la sécurité des véhicules conçus pour transporter des humains. La FAA a maintenant changé l’objectif pour reconnaître les membres d’équipage de vol qui démontrent des activités pendant le vol qui étaient essentielles à la sécurité publique, ou qui ont contribué à la sécurité des vols spatiaux humains, entre autres critères. »

Autre argument qui peut être avancé en faveur d’un durcissement de la définition : les vaisseaux spatiaux utilisés à des fins de tourisme spatial sont très automatisés, de sorte que les personnes à bord n’ont rien à faire, si ce n’est de profiter de leur petit tour. C’est typiquement le cas de la fusée New Shepard et de la capsule, construites par Blue Origin : tout est automatique et suivi depuis le sol.

Le badge de la FAA n’est pas le seul à exister aux États-Unis : d’autres ailes d’astronaute peuvent être décernées, par exemple par l’agence spatiale américaine (Nasa), pour son personnel allant dans l’espace. L’armée aussi en donne, via l’armée de la terre et l’armée de l’air, tout comme la marine, les gardes côtes et les marines. La Nasa prévoit aussi un badge à destination des civils.

La question de la facilité croissante avec laquelle il est possible d’aller dans l’espace, et de ce que cela peut induire sur la distinction d’astronaute, pourrait se poser à terme à d’autres pays. Cela étant, le développement du tourisme spatial se déroule pour l’heure avant tout de l’autre côté de l’Atlantique. S’il existe des programmes spatiaux ailleurs dans le monde, le volet touristique est quasiment inexistant.

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