Le plus grand radiotélescope du monde ouvre ses portes aux scientifiques du monde entier. Mais le fait qu’il soit situé en Chine pourrait compliquer les projets d’équipes américaines.

Les inscriptions sont ouvertes ! Fin mars, le radiotélescope chinois géant FAST, a commencé à accepter les dossiers de projets d’astronomes du monde entier. Les équipes dont les propositions seront retenues disposeront d’environ 10% du temps d’utilisation du télescope (les 90% restants sont réservés aux scientifiques chinois). La nouvelle semble cependant soulever autant de soulagement que d’inquiétudes aux États-Unis révèle le décryptage détaillé du média Undark.

Pour les scientifiques américains, l’ouverture du FAST (Five hundred meter Aperture Spherical radio Telescope) à la communauté internationale est une excellente nouvelle. Plusieurs projets menés aux États-Unis utilisaient en effet l’iconique télescope Arecibo. Construit en 1963, ce dernier a permis d’extraordinaires avancées mais sa structure vieillissante l’avait condamnée à la fermeture. Arecibo a même tiré sa révérence plus vite que prévu. Fin 2020, il s’est effondré, mettant un point final à l’aventure, et compliquant la poursuite des travaux des équipes qui s’en servaient.

Le FAST en Chine est le plus grand téléscope du monde. // Source : Google Earth

Le FAST en Chine est le plus grand téléscope du monde.

Source : Google Earth

L’arrêt brutal d’Arecibo a non seulement réduit le panel de sites utilisables par les astronomes, mais il leur a surtout enlevé un de leurs outils les plus précis. Professeure de physique et d’astronomie à l’université de Virginie interrogée par Undark, Maura McLaughlin, le confirme sans ambages : maintenant qu’Arecibo est hors d’usage, FAST est désormais le « seul télescope réellement adapté » aux travaux qu’elle et ses collègues mènent sur les transitoires radioélectriques en rotation (RRAT) au sein du projet NANOGrav.

Les américains redoutent les fuites technologiques

Le gigantesque radiotélescope chinois ne devrait pas se contenter, d’ailleurs, de suppléer à Arecibo. « Nous pensons que FAST (…) permettra des avancées scientifiques, et ouvrira de nouvelles perspectives de recherche en radioastronomie », explique à Undark, Keping Qiu, professeur à l’école d’Astronomie et de Sciences spatiales de l’université de Nanjing, et responsable du comité qui évalue les demandes d’accès au FAST.

Si l’ouverture du télescope aux équipes du monde entier est une excellente nouvelle, elle soulève toutefois des inquiétudes aux États-Unis. On le sait, ces derniers ont une relation compliquée avec la Chine, qui est leur principal concurrent sur la scène mondiale. De ce fait, les autorités américaines redoutent toujours que des collaborations entraînent des transferts de secrets technologiques à leur challenger.

Un levier dans les négociations ?

Une loi de 2011, connue sous le nom d’amendement Wolf, interdit par exemple à certaines agences gouvernementales américaines de collaborer avec la Chine sans consulter préalablement le FBI et notifier le Congrès. Selon Undark, des agences telles que la NASA pourraient dans ce contexte avoir des difficultés à obtenir ces feux verts.

Signe que le climat est à la méfiance : plusieurs scientifiques de l’Institut National de la Santé américain ont été licenciés ou ont dû démissionner car ils n’avaient pas dévoilé avoir reçu des financements en provenance de la Chine. Pékin, du reste, compliquera peut-être, lui aussi, certaines collaborations avec les États-Unis. Une autorisation d’accès à son télescope géant constitue en effet une contrepartie alléchante, dans des négociations diplomatiques. Et un refus, des représailles tout aussi ennuyeuses.

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