Un cinquième état de la matière maintenu plus d’une seconde, du voyage dans le temps sans paradoxes et un début de réponse à l’une des plus grandes questions sur l’Univers : voici des avancées ou expériences de physique marquantes en 2020.

Le domaine de la physique livre chaque année des avancées, des théories, des expériences, qui nous triturent l’esprit et peuvent faire évoluer notre vision de l’Univers ou de la réalité. Quelles sont les grandes actualités ou publications marquantes de la physique durant l’année 2020 ?

Un cinquième état de la matière maintenu

En 2018, la Station spatiale internationale (ISS) a été pourvue d’un nouvel outil : le Cold Atom Laboratory, sorte de super-frigo permettant de refroidir les atomes jusqu’à des températures proches du zéro absolu. Dans un papier publié dans Nature, en juin 2020, les scientifiques ont relaté une intrigante expérience réalisée avec cet instrument : un condensat de Bose-Einstein maintenu pendant plus d’une seconde.

C’est exceptionnel en cela qu’il y a normalement quatre états de la matière : le solide, le liquide, le gaz et le plasma. Ce condensat est un « cinquième état de la matière », descriptible comme un nuage gazeux d’atomes. Il est très difficile à maintenir sur Terre, raison pour laquelle l’expérience s’est déroulée à bord de l’ISS, en micro-gravité. Grâce à cela, le condensat imaginé par Einstein il y a des décennies a pu être maintenu plus d’une seconde.

Photographie du Cold Atom Laboratory quand il était en conception sur Terre. // Source : NASA/JPL-Caltech/Tyler Winn

Photographie du Cold Atom Laboratory quand il était en conception sur Terre.

Source : NASA/JPL-Caltech/Tyler Winn

Il s’agit d’une avancée importante sur le plan théorique pour la compréhension de la mécanique quantique, et pour développer de nouveaux outils. « Les applications vont des expériences en relativité générale et de la quête d’énergie sombre ainsi que d’ondes gravitationnelles à la navigation des vaisseaux spatiaux et à la recherche de minéraux sous la surface de la lune et autres corps planétaires », expliquait l’un des physiciens travaillant sur l’expérience.

Comment brillent les étoiles massives

Des travaux publiés en novembre dans Nature ont confirmé cette année une prédiction datant des années 1930. Grâce au détecteur Borexino, enterré 300 mètres sous terre en Italie, cette équipe scientifique a pu mesurer des neutrinos produits par la réaction dite chaîne CNO : la réaction en chaîne carbone-azote-oxygène. La théorie voulait que cette réaction soit à l’origine de la production d’énergie par les étoiles massives (et ainsi de leur brillance). En mesurant les neutrinos émis par notre Soleil, les scientifiques ont pu confirmer cette théorie, ce qui nous offre une vision plus complète de la physique des étoiles.

L’état fluide le plus parfait jamais atteint

Des chercheurs du MIT ont réussi à atteindre l’état fluide le plus parfait possible compte-tenu des limites de la mécanique quantique. En temps normal, un fluide rencontre en effet une friction. Cela génère de la viscosité. Plus le fluide rencontre de la friction, plus le fluide devient visceux. Il existe cependant un état, appelé « super-fluide », ou le fluide ne rencontre quasiment aucune friction. Très rare, ce type de phénomènes advient supposément au cœur d’étoiles à neutrons ou au sein de l’Univers primordial.

En ayant produit un super-fluide en laboratoire, ces scientifiques peuvent reproduire le comportement des ondes sonores au sein, notamment, d’une étoile à neutrons. Les fréquences sonores obtenues à partir du super-fluide sont extrêmement proches de ce que l’on pourrait entendre au cœur du gaz d’une étoile à neutrons « si l’on pouvait porter notre oreille au plus proche sans être déchiré par la gravité ». Il s’agit donc d’un outil précieux pour essayer de déchiffrer certains mécanismes physiques.

Un modèle mathématique pour voyager dans le temps sans paradoxes

Ce n’est pas là une découverte qui vous permettra de construire une machine à voyager dans le temps dans votre garage. Pardon pour cette fausse joie. Il s’agit plutôt d’un modèle mathématique relevant de la physique théorique. Le physicien australien Germain Tobar a décidé de répondre à la question suivante : les voyages dans le temps seraient-ils mathématiquement crédibles ? Il se trouve que, oui, « les calculs sont justes, et les résultats sont de la science-fiction ».

Ce modèle suggère que, contrairement à un récit comme 12 Monkeys, il ne serait pas possible de changer le cours des choses en voyageant dans le passé. // Source : SyFy

Ce modèle suggère que, contrairement à un récit comme 12 Monkeys, il ne serait pas possible de changer le cours des choses en voyageant dans le passé.

Source : SyFy

Ses calculs débouchent en effet au constat que si nous pouvions voyager dans le temps, aucun paradoxe ne pourrait advenir. Le cours des choses se recalibrerait d’une façon ou d’une autre. Par exemple, si vous essayez d’empêcher la pandémie de coronavirus en évitant au patient zéro d’être infecté, un peu dans une logique à la 12 Monkeys, « vous pourriez essayer d’empêcher le patient zéro d’être infecté, mais ce faisant, vous attraperiez le virus et deviendriez le patient zéro, ou quelqu’un d’autre le deviendrait », illustre Tobar.

D’après ses calculs, le futur ne peut pas être changé dans le passé en raison d’une harmonie physique et mathématique indépassable.

Pourquoi l’Univers est-il fait de quelque chose plutôt que de rien

Pourquoi l’Univers est-il fait de matière ? Notre existence est possible grâce à une déséquilibre original, à la faveur de la matière et en la défaveur de l’antimatière. Pourtant, par effet miroir, l’Univers aurait dû produire autant d’antimatière que de matière, il y a 13,8 milliards d’années. Une grande expérience de physique s’est peut-être bien rapprochée, en 2020, d’un début de réponse.

C'est dans ce type d'observatoire que les neutrinos ont été détectés et mesurés. // Source : Kamioka Observatory, Institute for Cosmic Ray Research

C'est dans ce type d'observatoire que les neutrinos ont été détectés et mesurés.

Source : Kamioka Observatory, Institute for Cosmic Ray Research

L’expérience T2K, coordonnée par une équipe internationale de 500 physiciens, a révélé une bizarrerie parmi les neutrinos et les antineutrinos : ils semblent asymétriques. En mesurant leur oscillation respective, les physiciens ont repéré que celle-ci diffère. Pourtant, matière et antimatière sont censées être parfaitement symétriques. Les chiffres de l’oscillation devraient être les mêmes. « Ces résultats pourraient être la première indication de l’origine entre l’asymétrie matière-antimatière dans notre Univers », écrivent les chercheurs, suggérant donc que la prédominance de la matière est à trouver parmi ces particules et leurs antiparticules.

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