Adaptée par Jenny Han de sa trilogie littéraire young adult éponyme, la série L’Été où je suis devenue jolie nous plonge dans les dilemmes d’un triangle amoureux, composé de Belly Conklin (Lola Tung) et deux frères, Conrad (Christopher Briney) et Jeremiah Fisher (Gavin Casalegno). Durant leur enfance, le trio a passé chaque été à Cousins Beach, la maison de vacances de Susannah Fisher (Rachel Blanchard). Cette dernière étant la meilleure amie de Laurel Conklin (Jackie Chung), la maman de Belly (vous suivez ?), tout ce beau monde, ainsi que Steven (Sean Kaufman), le grand frère de Belly, a grandi ensemble.
Durant la saison inaugurale, Belly fête ses 16 ans et se sent « devenir jolie » comme elle nous le raconte en voix-off, notamment aux yeux de Conrad, son crush d’enfant. Les deux adolescents semblent destinés l’un à l’autre, mais la mort de Susannah, atteinte d’un cancer, bouleverse l’équilibre du groupe.
Tandis que Conrad peine à gérer son deuil et rejette Belly, elle se rapproche de Jeremiah, qu’elle considérait jusqu’ici comme son meilleur ami. La saison 3 débute alors que Belly, sa meilleure amie Taylor (Rain Spencer) et Jer sont à la Fac. Mais dès le premier épisode, la série effectue un saut dans le temps de trois ans. Alors que le couple formé par Belly et Jer est menacé, ce dernier la demande en mariage !
Attention, la suite de cet article contient des spoilers sur la saison 3 de L’Été où je suis devenue jolie.

L’été où Jer est devenu le méchant de l’histoire
Et… elle dit oui ! Nous passons alors pas moins de sept épisodes à suivre les préparatifs d’un mariage qui court droit à la catastrophe. Car Belly est un peu la dernière à ne pas réaliser qu’elle est toujours amoureuse de Conrad. Comme par hasard, le grand frère Fisher squatte Cousins Beach comme jamais cet été-là, tandis que son fiancé travaille dans l’entreprise de son père. Conrad tente de se montrer soutenant face à ce mariage surprise, mais il se consume en secret pour Belly. Les moments qu’ils passent ensemble révèlent leur alchimie indéfectible.
Ces épisodes très hétéronormatifs (on a droit à l’EVJF, la soirée de fiançailles, la danse des garçons, etc) s’avèrent assez frustrants, probablement en raison du manque flagrant de suspens. À la décharge de la showrunneuse Jenny Han, il n’est pas évident de créer une histoire autour d’un triangle amoureux qui ne soit pas cousue de fil blanc (coucou Twilight !). La série culte des années 90, Dawson, qui repose aussi sur les amours de trois amis d’enfance, y était parvenue avec un peu plus de subtilité.

Il n’empêche, Dawson devenait malgré lui le méchant de l’histoire, celui qui empêche l’amour entre Joey et Pacey. Et c’est précisément ce qui se passe avec Jeremiah dans cette saison finale de L’Été où je suis devenue jolie. S’il était déjà caractérisé comme le frère enjoué et insouciant, en contraste avec le plus renfrogné et responsable Conrad, il adopte un comportement de plus en plus détestable. Il manque d’empathie, étouffe Belly, se révèle infidèle…

Le personnage est écrit pour que le public le prenne en grippe et cela n’a pas loupé. Sur les réseaux sociaux, les « anti Jer » se sont déchaînés sur le personnage, mais aussi son acteur, au point de parfois souhaiter sa mort ! Amazon Prime a ainsi publié un message d’avertissement pour rappeler aux nombreux fans de la série, très virale sur TikTok, de rester bienveillants. Cette haine de Jeremiah a pris une tournure réactionnaire, certains fans affichant avec dégoût des captures d’écran où le personnage est en position d’être câliné par Belly.
Ce n’est évidemment pas Conrad, au code moral digne d’un patriarche victorien, qui ferait la petite cuillère avec Belly ! La série met aussi les pieds dans le plat des stéréotypes concernant la représentation bisexuelle : Jeremiah est immature, infidèle et ne coche pas les codes de la virilité traditionnelle.
De son côté, le taiseux Conrad apparaît comme le parfait prince charmant. Il anticipe les besoins de Belly (il reste à Cousins pour ne pas laisser seule, sans lui demander son avis) et effectue un travail d’introspection pour mieux exprimer ses sentiments. Davantage de nuance dans les évolutions de Conrad et Jer aurait été judicieux.
Des personnages secondaires très réussis
Cette intrigue permet toutefois d’explorer l’un des points forts de la série : les relations entre les parents et leurs enfants. La saison creuse notamment celle de Belly et Laurel, cette dernière étant opposée au mariage de sa fille. Mais aussi celle d’Adam avec ses deux fils, ce qui apporte un peu de profondeur à ce personnage souvent odieux.

Il faut tirer notre chapeau aux personnages secondaires féminins très bien écrits : qu’il s’agisse de la touchante Taylor, dont la saison explore la relation très Gilmore Girls avec sa mère et avec son couple contrarié avec Steven (le meilleur couple de la série, c’est eux !), de la très badass Denise (Isabella Briggs), la nouvelle collègue de Steven, ou de la queen Agnes (Zoé De Grand Maison), l’amie de Conrad à San Francisco, ces protagonistes féminines savent ce qu’elles veulent et disent ce qu’elles pensent avec une franchise irrésistible.
L’Été où je suis devenue jolie serait bien fade sans cette constellation de protagonistes secondaires bien dessinés, que l’on prend plaisir à suivre, parfois davantage que la valse hésitation de Belly, Conrad et Jeremiah.
Belly in Paris
Surprise (non) : le mariage entre les deux tourtereaux finit par capoter ! Belly réalise que sa relation avec Jer tourne à la codépendance. Elle en veut aussi à Conrad, qui se décide à lui déclarer sa flamme la veille de son mariage. Il est clairement temps de prendre un peu de recul. La jeune femme décide de réaliser un rêve qu’elle partage avec plusieurs adolescentes de teen drama américains (Rory dans Gilmore Girls, Joey dans Dawson) : partir vivre à Paris !

L’Été où je suis devenue jolie pose ainsi ses valises dans la capitale pour ces trois derniers épisodes. Si la série n’évite pas quelques petits clichés (de l’accordéon, des croissants et des plans de coupe très carte postale), la vie de Belly à Paris ne ressemble pas à celle d’une certaine Emily. À peine arrivée, la jeune femme paumée se fait voler son sac et se fait refuser de son université. Elle doit jongler entre plusieurs petits jobs et passe ses premiers mois dans une colocation insalubre. On accorde volontiers un point à la série pour son réalisme !
Ce changement de décor bienvenu permet à Jenny Han de se concentrer sur l’évolution de son héroïne. Loin de ses doudous (sa mère, Cousins Beach, les frères Fisher), Belly galère mais apprend à vivre seule et se découvre des ressources insoupçonnées. En un mot, elle grandit et va même s’autoriser à sortir avec un de ses nouveaux amis, Benito (Fernando Cattori), qui vit à Paris. On retrouve aussi avec grand plaisir Corinna Brown (Tara dans Heartstopper) qui incarne l’une des nouvelles potes parisiennes de Belly.

De leur côté, les frères Fisher finissent par se dire leur quatre vérités sur la tombe de leur mère. Beaucoup plus agréables et divertissants à visionner que la partie consacrée au mariage, ces épisodes parisiens laissent toutefois un petit goût d’inachevé. Ils auraient mérité un peu plus de développement.
L’été où ils ont (finalement) grandi
Entre un saut dans le temps, une intrigue qui se déroule sur quelques mois, une nouvelle vie à Paris, puis la résolution du triangle amoureux, cette ultime saison aura connu un rythme assez saccadé, qui fonctionne mieux dans le roman que dans sa mise en images. La série aurait mérité davantage d’épisodes post-mariage, histoire de remettre tout le monde sur les rails.

Le tout dernier épisode, d’une durée record d’1h20, se concentre logiquement sur les retrouvailles tant attendues entre Belly et Conrad. Tandis que Jer cuisine à Cousins Beach pour ses proches, et entame enfin une introspection grâce à la clairvoyance de Denise (amenée à devenir sa petite-amie), Conrad surprend Belly à Paris, qui fête ses 22 ans le soir-même. Cela fait déjà un an (encore un saut dans le temps !) qu’elle évolue dans la capitale. Son grand amour découvre alors une jeune femme plus assurée, dans son look (un style plus parisien, une coupe au carré) comme dans sa vie.

Ces retrouvailles sont gérées avec beaucoup de délicatesse. Les deux âmes soeurs reviennent sur leurs erreurs passées et leurs doutes quant à l’avenir. Comme un écho à la bataille à laquelle se sont livrés les fans sur les réseaux sociaux durant toute la durée de diffusion de la série, la jeune femme avoue se sentir « la méchante » de l’histoire.
Déséquilibrée dans ses intrigues, mais fidèle au matériau d’origine, cette ultime saison de L’Été où je suis devenue jolie s’achève en apothéose dans la ville de l’amour, par un baiser sur la Seine, des ébats torrides et une déclaration d’amour finale dans un train. Plus romantique, tu meurs !
Si elle s’est parfois reposée sur des stéréotypes de genre et une vision un brin conservatrice de l’amour, L’Été où je suis devenue jolie reste cette bulle de nostalgie sur fond de musique pop des années 2020. Elle nous aura fait replonger avec délice à une époque où les cœurs découvraient les premières fois, où l’on pouvait toucher du doigt les souffrances et la liberté de la vie d’adulte, mais toujours aller se réfugier dans la maison de son enfance pendant les vacances. L’Été où je suis devenue jolie aura toujours ce goût doux-amer de paradis perdu.
Le verdict

L’été où je suis devenue jolie
Voir la ficheOn a aimé
- Une vibe estivale qui réchauffe les cœurs
- Des personnages secondaires attachants
- Un romantisme assumé
On a moins aimé
- Un triangle amoureux trop prévisible
- Une vision de l’amour un peu conservatrice
- Trop de sauts dans le temps
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