Simogo s’est fait connaître avec le coloré et remuant Sayonara Wild Hearts en 2019, course frénétique et musicale aux allures de clips de pop psychédélique. Avant cela, le petit studio suédois officiait principalement sur iOS où il livra quelques merveilles comme le mystérieux Year Walk et le génial récit interactif Device 6. Malgré l’incongruité du mélange, on pourrait presque voir dans Lorelei and the Laser Eyes, une synthèse étourdissante de leurs précédentes créations. C’est en tout cas une vraie petite claque, un titre d’une maîtrise absolue, un ovni, une pépite, un jeu que je ne suis pas près d’oublier. Vraiment pas.

Le premier contact avec Lorelei and the Laser Eyes est un choc esthétique. Tenue par un noir et blanc uniquement cinglé d’audacieuses touches d’un rouge magenta tirant vers le fuchsia, la direction artistique saisit d’emblée par sa radicalité. Où le minimalisme géométrique n’est qu’un trompe-l’œil fourmillant de détails. Le jeu s’amuse ensuite avec les codes du survival horror des années 90, le premier Resident Evil en tête. Avec ses caméras fixes qui alternent les points de vue pour mieux nous perdre et affirmer une mise en scène habile, le titre de Simogo réveille de vieux souvenirs d’errance dans un lugubre manoir et pose ainsi une ambiance troublante, entre fascination et angoisse.

Mais ici, point de zombies, aucune menace réelle si ce n’est celle de se perdre, physiquement et peut-être aussi mentalement. L’imposante bâtisse dans lequel s’aventure notre héroïne est en réalité un hôtel labyrinthique qui semble de prime abord désert et où le temps paraît figé — ou plutôt devrais-je dire, les lignes temporelles ? Car bien vite on repère des anomalies, des failles et des anachronismes qui laissent deviner une narration énigmatique, un récit savamment découpé pour nous perdre.

Où suis-je quand je joue à Lorelei and the Laser Eyes ?!

Disponibilité

Lorelei and the Laser Eyes est disponible sur PC et Nintendo Switch.

On comprend rapidement que, dans Lorelei and the Laser Eyes, tout est puzzle, tout est labyrinthe. L’histoire, les décors et surtout, le gameplay. Dans chaque pièce du manoir, on découvre une lettre, un livre, une photo, un tableau, des textes étranges où formules et symboles s’enchaînent pour nous étourdir. Fort de toutes ces trouvailles bien en mémoire dans un menu dédié très utile, on doit ensuite déverrouiller des cadenas chiffrés, aligner des statues, enclencher des interrupteurs… Bref, résoudre un nombre incalculable d’énigmes.

N’allez pas vous imaginer un vulgaire The Witness (si tant est que l’on puisse qualifié ce titre ainsi). Ici, même si les puzzles se déclinent en différentes versions, le challenge reste d’une grande variété. De cette manière, on n’a pas l’impression d’être dans un simple maquillage de puzzle game géant. Le plus bluffant et ensorcelant tient dans l’intrication de toutes ces énigmes qui donnent l’impression vertigineuse d’être face à un labyrinthe enchâssé dans un labyrinthe, lui-même enchâssé dans un labyrinthe, lui-même enchâssé dans un labyrinthe, lui-même enchâssé dans un labyrinthe, lui-même enchâssé dans un labyrinthe, lui-même enchâssé dans un labyrinthe, lui-même enchâssé dans un labyrinthe. Vertigineux, je vous dis… Trouver une solution crée ainsi par moment un effet domino où tout semble soudainement s’imbriquer dans une sensation de flow absolument grisante.

Lorelei and the Laser Eyes s’insinue ainsi dans notre cerveau pour créer une douce addiction

Car la profusion et la variété des énigmes proposées ont un double effet. D’une part, cela limite les culs-de-sac cognitifs : si l’on bloque sur un puzzle, il suffit d’aller voir ailleurs pour en trouver d’autres qui n’attendent qu’à être démêlés (l’aventure n’est pas du tout linéaire et plusieurs cheminements sont possibles). D’autre part, on a constamment des micro-récompenses avec, à la clé, ce sentiment stimulant d’être la personne la plus maligne de l’univers. Lorelei and the Laser Eyes s’insinue ainsi dans notre cerveau pour créer une douce addiction et s’y loger pour ne plus en sortir de sorte que l’on y repense encore et encore, même une fois l’écran éteint.

Source : Capture d'écran PC
La petite fille est flippante, mais n’ayez pas peur. Elle est là pour votre bien. Je crois… // Source : Capture d’écran PC

Qui suis-je ?!

Il faut dire qu’au-delà de l’ingéniosité de ses énigmes et de la finesse de la vaste toile narrative qu’il tisse autour de nous, le jeu sait comment marquer en nous prenant par surprise. Grâce à des mises en abyme étonnantes et de géniales idées de mise en scène, Lorelei and the Laser Eyes crée des instants suspendus, des séquences aussi saisissantes que mémorables. Elles montrent à quel point ses développeurs et développeuses s’amusent à jouer avec nous et avec leur propre création.

Seule petite ombre au tableau : une ergonomie que le studio a voulu épurée à l’extrême avec un seul bouton pour toutes les actions — reliquat de leur passé de spécialistes de l’écran tactile, semble-t-il. Le hic, c’est que la navigation dans les (très importants) menus est un peu fastidieuse au début en l’absence d’une seconde touche « annuler/retour » qui manque cruellement.

Source : Capture d'écran PC
Quand je vous dis que tout est labyrinthe dans ce jeu // Source : Capture d’écran PC

On recommandera également de garder un carnet de notes près de soi ou au minimum un gros bout de papier où gribouiller chiffres et symboles pour mieux réfléchir et garder quelques traces de ce que l’on croise d’étrange, çà et là. Néanmoins, ne vous laissez pas intimider par ces remarques. Lorelei and the Laser Eyes reste bienveillant et sait très bien doser son challenge. Il a, en outre, l’intelligence de ne pas trop éparpiller ses puzzles, de sorte que la réponse a la plupart d’entre eux se trouve juste là, sous vos yeux. Vos yeux laser.

Le verdict

Source : Capture d'écran PC
9/10

Lorelei and the Laser Eyes

Voir la fiche

Captivant par sa direction artistique audacieuse, Lorelei and the Laser Eyes nous embarque vite dans ses méandres où nous attendent autant de mystères que de puzzles.
Héritier du survival horror dans ses atours pratiques et visuels, il joue avec les codes pour mieux nous surprendre et nous saisir.
En réalité, la profusion d’énigmes et de puzzles qui nous attend dans cet étrange manoir crée un fascinant labyrinthe où l’on se perd avec bonheur.
Fourmillant d’idées et de créativité, le challenge est aussi varié que stimulant au point d’en devenir addictif.
Décrypter des codes, trouver des combinaisons, relier les fils narratifs entre eux…
On se prend très vite à cette mécanique où les énigmes s’emboîtent comme des poupées russes.
Elles forment au final une œuvre absolument unique, jubilatoire.
Une œuvre comme on en croise peu.
Vertigineuse.
Rarement ai-je vu un titre aussi intelligent, maîtrisant aussi bien fond et forme pour les faire se répondre parfaitement.
Et ce que j’en pense se résume finalement en quelques lettres, mais… lesquelles ?

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