« Il vaut mieux un bon accord qu’un mauvais procès ». Voilà ce qu’a lancé Gérald Darmanin, le ministre de l’Action et des Comptes publics, après l’accord à l’amiable entre Google et l’État. Mais de quoi est-il question ?

De quoi s’agit-il ?

Pour mettre fin à ses ennuis fiscaux en France, Google a décidé d’ouvrir largement son porte-monnaie. Jeudi 12 septembre, il a été annoncé que la firme de Mountain View va verser un total de 965 millions d’euros à l’État, ce qui lui permettra d’éteindre une fois pour toutes les poursuites dont il fait l’objet. Cette somme, qui avoisine le milliard d’euros, a été conclue dans le cadre d’un accord avec les autorités.

En réalité, ce montant couvre deux accords transactionnels. Le premier, de 500 millions d’euros, est une amende d’intérêt public qui permet aux parties de ne pas aller jusqu’au procès. Le second, de 465 millions d’euros, a été passé avec la Direction générale des finances publiques. Il s’agit-là aussi d’en finir avec les procédures de redressement fiscal qui poursuivaient l’entreprise américaine.

L’amende de 500 millions d’euros, prise dans le cadre d’une convention judiciaire d’intérêt public signée entre le procureur de la République financier de Paris et les sociétés Google France SARL et Google Ireland Ltd, a été approuvée par le président du tribunal de grande instance de Paris le 12 septembre. Elle s’est inscrite dans une « démarche coordonnée avec l’administration fiscale », indique le procureur.

Le communiqué du procureur rappelle que cette convention prend racine à la suite d’une enquête préliminaire ouverte le 15 juin 2015 par le parquet national financier. Une plainte avait été préalablement déposée par la direction régionale des finances publiques d’Île-de-France au motif que Google Ireland Ltd a failli à correctement déclarer ses impôts entre 2011 et 2014.

Qu’est-ce que la convention judiciaire d’intérêt public ?

La convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) est un nouveau dispositif qui a vu le jour par la loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique de 2016. La CJIP est proposée par le procureur de la République à une personne morale — une entreprise par exemple — et, si elle est acceptée par l’autre partie, lui permet de ne pas voir sa culpabilité reconnue.

Ce dispositif est possible dans le cas où le mis en cause ou le mis en examen l’est pour des cas de corruption, de trafic d’influence, de blanchiment de fraude fiscale ou pour des infractions connexes. Outre l’absence de reconnaissance de culpabilité, la convention, une fois validée, n’est pas susceptible de recours. D’autres obligations, en plus du versement de l’amende, sont prévues.

Google

Les locaux de Google France.

Source : Google

Le choix de la CJIP offre certains avantages.

Il trace une issue certaine à un dossier, là où un procès peut se conclure par un échec (le double raté devant les tribunaux du cas Google en est la preuve). Il permet de boucler une affaire rapidement plutôt que de perdre des années de procédure et de l’argent dans la procédure. Et surtout, la sanction de la CJIP ne diffère pas fondamentalement de ce qu’un tribunal aurait prononcé contre une société en guise de sanction pénale.

À l’inverse, le désavantage évident de ce mécanisme est qu’il ne grave pas dans le marbre le tort d’une personne morale, puisqu’il n’a pas de procès à proprement parler. La CJIP, une fois validée, « n’a ni la nature ni les effets d’un jugement de condamnation », rappelle le ministère. D’une certaine façon, au symbole d’une condamnation qui n’est pas garantie, on préfère le pragmatisme et l’efficacité de la CJIP.

Et maintenant ?

Approuvée et rendue publique, la convention a suscité des commentaires aussi bien du côté du gouvernement que de Google. Pour Gérald Darmanin, le ministre de l’Action et des Comptes publics, les objectifs ont été atteints : non seulement Google va régler ce qu’il devait, mais en plus la somme « est très proche » de ce qui était demandé à l’origine, jure-t-il dans une interview accordée au Figaro.

Surtout, le ministre se dit très satisfait de cette stratégie de l’accord à l’amiable avec les géants du numérique. Gérald Darmanin chiffre ainsi à deux milliards d’euros le montant qui a pu être récupéré auprès d’eux en passant des accords au cas par cas. « Il vaut mieux un bon accord qu’un mauvais procès », ajoute-t-il. « Surtout lorsque l’État les perd », en référence aux déconvenues passées.

Du côté de Google, l’accent a été plutôt mis sur l’absence de reconnaissance de culpabilité malgré le fait qu’un paiement a été acté pour régler les litiges en cours. Cela permettra « d’aller de l’avant », déclare un avocat de Google. La firme ajoute qu’une «réforme coordonnée du système fiscal international est la meilleure façon d’offrir un cadre clair aux entreprises opérant dans le monde entier ».

La journaliste Isabelle Szczepanski rappelait cet été que Google soutient activement la modification des traités internationaux pour payer l’impôt des sociétés non plus aux USA essentiellement, mais dans tous les pays où il gagne de l’argent. Cependant, l’une des difficultés dans les négociations entre États est la différence de traitement avec d’autres entreprises en dehors du numérique.

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