La Cnil s’est penchée sur Reporty, une expérimentation sous la forme d’une application qui permettait de signaler des incivilités, des délits ou des crimes en filmant la scène. Pour l’autorité, l’application n’était pas proportionnée et ne bénéficiait pas de fondations juridiques solides.

Reporty, une application de la Ville de Nice conçue pour mobiliser la population face aux incivilités ou aux évènements graves, a fait l’objet d’une couverture médiatique en début d’année. En effet, celle-ci servait à signaler à la police tout évènement qui nécessiterait l’intervention des forces de l’ordre. Rien d’anormal, sauf que ces alertes étaient accompagnés d’un enregistrement vidéo et sonore.

À cela s’est ajoutée une autre polémique, celle des mouchards et de la collecte des données sur les utilisateurs. L’application a été épinglée par Exodus Privacy et la Quadrature du Net pour l’usage d’outils de suivi et pour le cadre légal utilisé par le système pour fonctionner. La mairie s’est défendue d’utiliser des mouchards, parlant à la place de modules d’analyse, mais a fini par promettre de demander leur retrait.

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Deux insuffisances

Aujourd’hui remisée au placard — il s’agissait en effet d’une expérimentation qui s’est étalée du 10 janvier au 10 mars –, l’application a quand même attiré l’attention de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, qui a mené un « examen circonstancié ». Conclusion ? Les mesures qui auraient pu autoriser une relative « atteinte à la vie privée » n’étaient pas remplies.

Deux raisons ont amené à la Cnil à considérer un déséquilibre entre le but légitime de prévenir les troubles à l’ordre public et le cadre juridique autorisant la mise en place d’un tel système. Tout d’abord, il a été mis en avant la « fragilité de la base légale » sur laquelle reposait l’initiative, mais aussi la disproportion de Reporty du fait de « ses caractéristiques propres ».

Sur ce deuxième point, la Cnil note en particulier que « ce dispositif, très intrusif, peut impliquer non seulement la collecte instantanée mais aussi l’enregistrement de données telles que l’image et la voix de tiers présents sur la voie publique. Il s’applique en outre, à un champ très large d’incidents ou d’évènements, allant d’incivilités jusqu’à des infractions délictuelles et criminelles graves ».

Reporty

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Une copie à revoir

Certes, des garanties figuraient dans le logiciel mais elles étaient « insuffisantes ». Il y avait notamment une charte de bonnes pratiques pouvant conduire à la désinscription du service en cas de mésusage.

Par ailleurs, un autre aspect qui a inquiété la Commission concerne la sécurité physique des personnes se servant de Reporty. D’après la Cnil, le projet « était susceptible de faire courir des risques réels pour les personnes dénonçant les incivilités ou [tout incident grave] dont elles sont témoins ou victimes ». Dans ces conditions, il était plus que temps que l’expérimentation s’arrête.

La Cnil indique qu’elle va adresser un courrier à la mairie de Nice. Peut-être lui dira-t-elle qu’elle peut envisager un redéploiement du dispositif, mais à la condition de bénéficier d’un meilleur encadrement législatif — ce qui pourrait nécessiter une loi ad hoc — et de réévaluer significativement l’ampleur des capacités d’enregistrement et de géolocalisation de l’application.

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