C'est dire toute l'hypocrisie générée par le montage juridique imaginé par Amazon. Le géant américain a ouvert aujourd'hui aux Etats-Unis son service Kindle Unlimited, qui permet d'avoir un accès illimité à une sélection de plus de 600 000 livres électroniques à lire sur un écran, pour 9,99 euros par mois. Mais officiellement, il ne s'agit pas d'un service de location. Il s'agit d'une bibliothèque privée, avec son propre règlement.
C'est ainsi qu'Amazon espère détourner en France la loi sur le prix unique de vente des livres électroniques, et son décret d'application qui ne laisse pourtant aucun doute sur le fait que la fourniture de fichiers de livres électroniques sous DRM est bien visé par le législateur.
Une "adhésion"
Les conditions d'utilisation proposées par Amazon aux Etats-Unis, qui sont certainement très proches de celles prévues en France, sont d'une rédaction exemplaire. Les juristes de la firme ont veillé à ne jamais utiliser aucun terme qui pourrait qualifier la transaction.
Les mots "ventes", "location" ou même "prêt" ne figurent pas dans le contrat, qui utilise le terme "adhésion" au "programme" Kindle Unlimited. "Si votre adhésion prend fin, vous n'aurez plus accès aux titres que vous avez sélectionnés à partir du programme", se contente de dire Amazon.
10 livres à la fois
Il faut se rendre dans l'aide de Kindle Unlimited pour voir qu'il est précisé que "vous pouvez conserver jusqu'à 10 livres à la fois et il n'y a pas de date de retour". Ainsi, comme s'ils utilisaient les services d'une bibliothèque et se rendaient à l'accueil pour rendre les livres empruntés avant de pouvoir en emprunter d'autres, les utilisateurs de Kindle Unlimited peuvent télécharger jusqu'à 10 fichiers de livres électroniques à lire sur leur tablette, mais doivent "retourner" chacun des livres qu'ils ne veulent plus conserver. Une opération purement virtuelle qui n'a d'intérêt que juridique.
Ainsi Kindle Unlimited n'est qu'une grosse bibliothèque privée qui participe à son propre programme de prêts Kindle. Mais une bibliothèque qui pourrait rapidement supplanter toutes les autres, et rendre très inattractif les "petits libraires" que la loi sur le prix unique des livres numériques était censée protéger.
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