Depuis la signature du décret de Donald Trump sur l’interdiction d’entrée aux États-Unis de ressortissants provenant de pays à majorité musulmane, plusieurs entreprises de la Silicon Valley ont pris la parole pour déplorer les conséquences désastreux que cet ordre va produire.

Le décret signé par Donald Trump le 27 janvier a fait couler énormément d’encre au cours du week-end. Entrée en vigueur, hasard du calendrier, le même jour que la journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, la mesure interdit en effet aux ressortissants de sept pays du Moyen-Orient et d’Afrique d’entrer sur le territoire américain pour une période de 90 jours (indéfiniment dans le cas de la Syrie), au prétexte d’empêcher l’arrivée hypothétique de terroristes.

Contesté sur le plan de l’efficacité dans la mesure où, étonnamment, il n’exclut par des pays comme l’Arabie saoudite alors que plusieurs de ses citoyens ont été impliqués dans des attentats contre les États-Unis (des considérations économiques ont certainement pesé, l’Arabie saoudite étant un partenaire stratégique des USA depuis 1945), le décret est aussi dénoncé pour des raisons morales et c’est sur ce terrain que plusieurs entreprises de la Silicon Valley ont justement pris la parole.

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CC A G

Google a réagi en déclarant à Bloomberg être « préoccupé par l’impact de ce décret et de toute proposition qui pourrait imposer des restrictions aux employés de Google et à leurs familles, ou qui érigent des barrières empêchant la venue de grands talents aux États-Unis ». L’un des deux cofondateurs de Google, Sergey Brin, né en ex-URSS, a été aperçu dans les manifestations contre le décret, tandis que Sundar Pichai, l’actuel CEO originaire d’Inde, a fait part de sa « douleur ».

« L’interdiction générale concernant l’entrée des citoyens de certains pays principalement musulmans n’est pas la meilleure façon de relever les défis du pays », a commenté pour sa par Elon Musk, le patron de Tesla et SpaceX. Désormais membre du conseil économique de Donald Trump, il a ajouté que « Beaucoup de gens affectés négativement par cette politique sont de puissants partisans des États-Unis. Ils ne méritent pas d’être rejetés ».

Jack Dorsey, le patron de Twitter, s’est aussi rallié au concert des protestations, décrivant un décret « bouleversant » tant pour des raisons humanitaires qu’économiques. « Nous bénéficions de ce que les réfugiés et les immigrants apportent aux États-Unis ». « Twitter est fabriqué par des immigrants de toutes les religions », a complété le compte officiel du réseau social.  Apple, par la voix de Tim Cook, a aussi pris la parole pour dire que ce décret « n’est pas le genre de politique que nous soutenons ».

Le patron de Netflix, Reed Hastings, a parlé de son côté  sur Facebook d’une « semaine très triste » : « les actions de Trump affectent les employés de Netflix tout autour du monde et sont tellement non-américaines qu’elles nous font mal à tous. Pire encore, ces actions rendront l’Amérique plus vulnérable (par la haine et la perte d’alliés) au lieu de la rendre plus sûre ». Un avis partagé par Marc Benioff, le directeur de Salesforce, un éditeur de logiciels, qui s’est manifesté contre le décret sur Twitter.

De son côté, Intel s’est montré prudent en expliquant qu’un soutien juridique peut être apporté à ses employés potentiellement affectés, rappelant au passage que tous sont entrés et vivent aux États-Unis légalement. Le fondeur a rappelé que la société a été fondée par un immigrant et que sa politique reste en faveur d’une arrivée de migrants légaux. Une prudence que l’on a retrouvé dans la réaction d’Amazon, évoquant juste une aide pour ses salariés qui seraient en difficulté.

Un commentaire de la vice-présidente des ressources humaines a par la suite été transmis, indiquant que « dès le début, Amazon s’est engagé pour l’égalité des droits, la tolérance et la diversité » et « a travaillé dur pour attirer des gens talentueux venant du monde entier ». Cette mixité est « l’une des choses qui rend Amazon formidable », a-t-elle ajouté. Une modération dans le propos qui tranche avec la décision d’Airbnb : la compagnie s’est en effet mobilisée pour héberger gratuitement ceux affectés par le décret.

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Le géant de la vente en ligne avait lancé le programme en 2014.

Source : palomaleca

Comme d’autres entreprises, Microsoft a annoncé un soutien juridique pour ceux touchés par le décret et indiqué « partager les inquiétudes au sujet de l’impact du décret ». Par la suite, les critiques se sont faites plus vives : « nous croyons que le décret est dévoyé et qu’il constitue un grave recul ». « Il y a des façons plus efficaces de protéger le public sans créer autant de dommages collatéraux à la réputation et aux valeurs du pays ». Un avis que Mozilla partage.

« Il s’agit d’un mauvais précédent qui ignore l’histoire et qui est susceptible de faire plus de mal que de bien », a estimé Chris Beard. Le patron de Mozilla a pointé les effets qu’un tel ordre aura sur le plan économique — « en fermant la porte aux immigrants de talent, l’interdiction va créer une barrière à l’innovation et au développement économique » — et sur le plan des valeurs, citant des conséquences négatives « à rejeter des réfugiés fuyant la persécution, la terreur et la guerre ».

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Sur Facebook, Mark Zuckerberg a rédigé un statut dans lequel il a rappelé que lui-même a des origines européennes tandis que sa femme vient d’une famille asiatique. Parlant de ses « préoccupations » au sujet du décret, il a tenu des propos modérés contre Donald Trump en soulignant que « nous sommes une nation d’immigrants » et que les États-Unis profitent de tous les apports venus d’autres cultures. « J’espère que nous trouverons le courage et la compassion pour rassembler es gens et faire de la Terre un meilleur endroit pour tout le monde », a-t-il conclu.

Quant à Lyft, une société proposant une application pour mettre en contact des passagers avec des conducteurs, elle a annoncé un don d’un million de dollars chaque année au cours des quatre ans à venir pour soutenir l’ACLU, une puissante organisation américaine dédiée à la défense des libertés individuelles. Et son patron, Logan Green, de déclarer à Re/Code « qu’empêcher des personnes d’entrer sur le territoire américain en raison de leur religion est contraire aux valeurs fondamentales de Lyft et de notre nation ».


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