Les services du Premier ministre ont mis en ligne une page devant rendre compréhensible la riposte graduée. Mais ils commettent des erreurs révélatrices de ce qu’aurait dû être l’Hadopi, si elle avait été ni hypocrite, ni complètement absurde.

La page date du mois de novembre, mais elle nous avait échappée jusque là. Le site internet officiel de l’administration publique, Service-Public.fr, a mis en ligne une page rédigée par la Direction de l’information légale et administrative de Matignon, sur la loi Hadopi. Intitulée « Téléchargement illégal », elle doit informer les citoyens sur leurs droits et devoirs, en vulgarisant dans la forme le contenu de la loi, sans en trahir le fond. Un exercice déjà délicat pour la plupart des lois, qui devient extrêmement difficile pour l’Hadopi.

Les services du gouvernement (qui font un lien vers le très neutre site de la Sacem pour « en savoir plus »…) rappellent tout d’abord le principe, selon lequel « il est interdit de copier ou d’enregistrer sans autorisation des fichiers, musiques et films sur Internet« . Jusqu’ici, tout va bien. L’exercice de la vulgarisation oblige à pardonner l’oubli de l’exception pour copie privée, ou l’existence des œuvres du domaine public.

En revanche, les choses se corsent pour le volet « prévention », plus spécifiquement dédié à l’Hadopi. Le site du gouvernement prévient en effet que l’abonné à Internet « reçoit un courriel de son fournisseur d’accès lui rappelant l’obligation de veiller à la bonne utilisation de son accès à Internet« , qui « l’avertit des sanctions qu’il encoure s’il recommence (à télécharger illégalement)« . Le courrier « contient aussi une proposition de sites de téléchargement autorisé, (et) les moyens existants pour sécuriser sa connexion« , assure la page d’information.

Or si c’est bien là l’esprit du dispositif imaginé par le législateur, ça n’est pas du tout celui qu’il a adopté, ni surtout celui qui est appliqué par la Haute autorité. Pour contourner une décision du Conseil constitutionnel de 2005 qui avait interdit de sanctionner spécifiquement le téléchargement illégal, ça n’est pas le fait d’avoir téléchargé illégalement qui est sanctionné par l’Hadopi, mais le fait de ne pas avoir sécurisé l’accès à Internet pour empêcher qu’il soit utilisé à des fins de piratage. Ce qui ne peut pas être prouvé, mais tout juste présumé.

De plus contrairement à ce que croient naïvement les services de Matignon, le courrier de l’Hadopi ne contient pas « les moyens existants pour sécuriser sa connexion« . Cela aurait dû être le cas, puisque la loi votée par le Parlement impose que le courrier contienne une information sur « l’existence de moyens de sécurisation permettant de prévenir les manquements à l’obligation ». Mais en tordant le texte pour le rendre applicable malgré l’absurdité du procédé, la Commission de protection des droits de l’Hadopi a jugé qu’il n’était pas nécessaire d’attendre que de premiers moyens de sécurisation fiables soient reconnus avant d’enclencher la riposte graduée. Les premiers mails ont été envoyés avant-même la parution du décret qui permet une certification au rabais des logiciels de sécurisation.

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