Posté à l’entrée du hall 2C, le stand extérieur de Dassault Aviation est impossible à manquer lorsque l’on déambule dans le parc des expositions du Bourget. Falcon, Rafale, le géant français de l’aéronautique expose fièrement ses plus grands succès, mais également ses promesses pour l’avenir. Parmi elles, la vedette de cette édition 2025 : une maquette taille réelle de l’UCAS (Unmanned Combat Air System). Un drone de combat autonome dont la mise en service opérationnelle aux côtés du Rafale F5 est envisagée à l’horizon 2033. Une pièce maîtresse qui s’inscrit dans un projet européen bien plus large : le SCAF.
Le Système de Combat Aérien du Futur vise à transformer la puissance militaire du continent en y intégrant une dimension numérique inédite. Un programme jalonné d’espoirs, de doutes et d’obstacles. Mais alors que la souveraineté numérique s’impose désormais au cœur des débats sur la défense européenne, où en est réellement le SCAF ?

L’ambition du SCAF : écosystème militaire interconnecté
Juillet 2017 : la France et l’Allemagne surprennent en annonçant une « feuille de route » commune pour développer un « système de combat aérien » franco-allemand, destiné à remplacer à long terme les flottes d’avions de combat, Rafale et Eurofighter en tête. L’horizon 2040 se dessine alors comme l’aboutissement de cette nouvelle collaboration, portée par Emmanuel Macron, fraîchement élu président de la République, et Angela Merkel, la chancelière allemande. Une autre époque.


Juin 2025 : sur le tarmac du Bourget, la maquette taille réelle de l’UCAS attire les curieux et tente de raviver l’enthousiasme autour du programme. À ses côtés, le prototype du NGF (New Generation Fighter), un avion de 6e génération que le drone de combat européen est censé accompagner en vol.

Car le SCAF n’est pas qu’un nouvel avion ou un simple drone : c’est un écosystème interconnecté, combinant le NGF, des drones de combat autonomes (UCAS), mais également des capteurs avancés et un cloud de combat partagé. Le tout conçu uniquement par des partenaires européens. La France et l’Allemagne, initiateurs du projet, ont été rejoints dans la conception par l’Espagne en 2021, tandis que la Belgique joue un rôle d’observateur. L’objectif : garantir la supériorité aérienne européenne face à des adversaires capables de brouiller, leurrer ou saturer les défenses traditionnelles, et d’opérer dans toutes les couches de l’espace aérien, du très bas à l’exo-atmosphérique.
Cette architecture « cloudisée » doit permettre aux différents éléments du SCAF de partager instantanément des données, de coordonner leurs actions notamment grâce à l’IA.
Les premières livraisons sont prévues pour 2040
Le SCAF sera ainsi capable d’opérer dans les environnements les plus contestés, en s’appuyant sur la connectivité, la résilience cyber et la rapidité de la prise de décision. Pour atteindre cet objectif, les meilleures entreprises européennes sont mises à contribution, et c’est parfois cette collaboration qui coince.

Le projet avance, mais il reste de nombreux défis à relever. Le SCAF est actuellement en phase 1B, une étape de conception et de développement de démonstrateurs, qui mobilise plus de 2 000 ingénieurs et un budget de plus de 3 milliards d’euros sur trois ans. Cette phase doit aboutir à la réalisation de prototypes, dont le premier vol d’essai est prévu pour 2029. Si le calendrier est respecté, l’entrée en service opérationnel est attendue à l’horizon 2040.
La route est semée d’embûches : des tensions persistent entre les industriels (Dassault, Airbus, Indra) sur la répartition des tâches et la gouvernance du programme, chaque pays défendant ses intérêts stratégiques et industriels. Ce jeu d’équilibre ralentit parfois la prise de décision et pourrait affecter le calendrier.
Une course technologique et géopolitique
Le SCAF est présenté comme le fer de lance de la souveraineté numérique européenne, mais, comme le souligne le rapport de l’IFRI de janvier 2025, cette souveraineté reste à construire. Le « cloud de combat » censé relier tous les acteurs du champ de bataille pose des défis immenses en matière de cybersécurité, de résilience logicielle et de maîtrise des flux de données. La multiplication des interfaces, l’intégration de l’IA et la dépendance aux composants critiques (notamment les semi-conducteurs) exposent le programme à des vulnérabilités majeures.
Le rapport pointe aussi le risque de voir l’Europe décrocher face à la concurrence américaine (NGAD — Next Generation Air Dominance) et britannique-japonaise-italienne (GCAP — Global Combat Air Programme), dont les calendriers sont plus avancés et les investissements plus massifs. Pour éviter de devenir un « suiveur technologique », le SCAF doit accélérer sur l’innovation, la cybersécurité et l’intégration des briques logicielles souveraines.
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