Le ministre de la Culture en a fait un argument massue lors de son discours d’introduction alors qu’il présentait la loi Hadopi 2. « La loi appliquée en Suède depuis avril 2009 a permis de diminuer de 40 % le trafic sur internet et d’augmenter de 14 % la vente de disques au premier semestre et de 57 % les ventes en ligne« , a lancé Frédéric Mitterrand mardi à l’hémicycle en faisant référence à l’entrée en vigueur en Suède de la loi IPRED, qui permet aux ayants droits suédois de collecter les adresses IP des internautes. « Il est inutile de contester ces chiffres« , a-t-il même ajouté, sans préciser toutefois que la loi suédoise est simplement l’équivalent du dispositif légal déjà en place en France, et qu’elle n’autorise absolument pas de « riposte graduée » façon Hadopi.
Les données ont été bien sûr relayées en France par le SNEP, le syndicat des maisons de disques. « La mise en œuvre d’une régulation de l’Internet a eu des effets immédiats sur le marché de la musique enregistrée en Suède : les ventes de musique en ligne ont augmenté au deuxième trimestre 2009 de 78% par rapport au deuxième trimestre de l’année précédente. De même, le marché des supports physiques a connu une progression de 0,4% sur la même période« , a ainsi assuré David El Sayegh, son nouveau directeur général.
Mais si à l’Assemblée Nationale le ministre de la culture dit qu’il est inutile de contester ces chiffres, certains en Suède ne s’en privent pas. « L’industrie musicale a tout à gagner au bruit que ça fait dans les médias, mais nous n’avons aucune idée de la manière dont ils sont arrivés à ces chiffres et ce qu’ils veulent dire« , a ainsi réagi Roger Wallis, professeur à l’école de commerce KTH, et lui-même ancien producteur de disques (certains se souviendront que sa femme avait reçu des centaines de bouquets de fleurs après son témoignage sans concession au procès de The Pirate Bay).
« On ne sait rien de ces chiffres de l’association des éditeurs de phonogrammes, proteste Wallis, comment ils y sont parvenus ou ce qu’ils contiennent. Et tant qu’ils ne le précisent pas ça ne vaut rien. De plus, on ne sait pas vraiment si le téléchargement a diminué autant qu’on le prétend« .
Il rappelle que « les personnes qui diffusent les messages (sur l’effet bénéfique de la loi) sont aussi celles qui ont le plus à gagner d’une tendance probable« .
Robert Gustavsson, fondateur de la société Inprodicon qui vend de la musique en ligne, a lui aussi constaté une augmentation des ventes de musique en ligne au printemps. Mais il l’attribue non pas à la mise en œuvre de la loi, mais à une augmentation de la qualité du service. D’ailleurs, s’il y a bien eu baisse du trafic, il y a eu aussi une remontée à un niveau désormais supérieur à celui de l’an dernier à la même période.
Mais peut-être le SNEP pourrait-il se montrer plus précis dans les chiffres pour permettre à chacun d’y voir plus clair ?
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