Étant donnée l’impossibilité d’effectuer une reconstitution sur place, le camp d’Auschwitz a été reconstruit virtuellement pour le remettre dans l’état où il était avant 1944, et permettre aux enquêteurs de vérifier et démentir les allégations d’agents nazis poursuivis en justice.

Plus de 70 ans après la fin de la seconde guerre mondiale, des procès continuent à être instruits à l’encontre de celles et ceux accusés d’avoir sciemment participé aux exactions du régime nazi, et en particulier à la mise à mort massive et méthodique de Juifs dans des camps d’extermination. Ces procès s’intensifient ces dernières années en Allemagne sous l’impulsion de « chasseurs de nazis » qui, depuis un jugement de 2011, parviennent à faire condamner des individus pour lesquels il n’existe pas de preuve de participation active aux crimes contre l’humanité, mais dont la « complicité de meurtre aggravée » est retenue.

Instruire de tels procès 70 ans après les faits, dans lequel les accusés et témoins sont âgés aujourd’hui de plus de 90 ans, n’est toutefois pas une mince affaire. Entre perte de mémoire réelle ou volonté délibérée de mentir, il n’est pas toujours simple de faire la part des choses, ni surtout de démontrer qu’une version prétendue n’est pas plausible. Avec une scène de crime habituelle, il est toujours possible de réaliser des reconstitutions. Mais c’est beaucoup plus difficile avec le camp d’Auschwitz, en partie détruit en 1944 — les crématoriums et d’autres installations avaient été détruits pour dissimuler les preuves d’une planification industrielles des meurtres.

Le modèle peut être utilisé pour contrer les objections de suspects

Pour aider les procureurs, magistrats et jurés, l’administration judiciaire de Bavière a donc fait réaliser une maquette en réalité virtuelle de ce qu’était le camp de la mort avant l’arrivée des troupes alliées et la découverte de l’étendue des pertes humaines. On estime qu’1,1 million de personnes sont mortes à Auschwitz sous l’impulsion d’Adolf Hitler et de son administration.

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Grâce à la reconstitution en VR du camp d’Auschwitz, basée sur les plans de construction retrouvés après la guerre, les enquêteurs peuvent marcher virtuellement sur les lieux et voir « de leurs propres yeux » ce qu’aurait pu voir un agent du régime nazi au moment des faits. Pour retenir la complicité, il est essentiel de prouver que l’accusé ne pouvait pas ne pas savoir ce qu’il se produisait dans le camp.

« Le modèle peut être utilisé pour contrer les objections de suspects qui prétendent qu’ils n’ont pas été témoins d’exécutions ou de marches vers les chambres à gaz depuis leur situation », explique à NBC News Jens Rommel, le directeur des poursuites contre les anciens nazis.

Les modèles 3D réalisés d’après les plans ont été fusionnés avec des photographies et mesures laser prises sur place en 2013 par les équipes bavaroises, ainsi qu’avec des photographies aériennes.

À notre connaissance, c’est la première fois que la réalité virtuelle est ainsi utilisée pour reconstituer une scène de crime détruite ou modifiée, et contredire les souvenirs d’un accusé ou d’un témoin. Si l’utilisation de la reconstitution 3D par scanners est désormais chose courante dans la police et la gendarmerie, le déplacement virtuel dans une scène reconstituée par l’accusation est en revanche inédite, et pourrait poser des questions nouvelles pour les droits de la défense.

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