Les députés examinent cet après-midi la proposition de loi sur la surveillance internationale, qui doit légaliser et légèrement encadrer les pratiques d'espionnage des services de renseignement français. Tout est fait pour ne pas débattre d'un texte vu avec craintes à l'étranger.

Mise à jour : la proposition de loi a été adoptée jeudi soir par l'Assemblée nationale sans modifications substantielles.

Elle est pourtant d'importance majeure, mais le Gouvernement fait tout, avec l'aide de parlementaires conciliants, pour enterrer le débat. La proposition de loi sur la surveillance internationale, qui vient patcher la seule partie substantielle de la loi sur le Renseignement censurée par le Conseil constitutionnel, est examinée ce mercredi après-midi à l'Assemblée nationale, coincée entre plusieurs textes — comme s'il s'agissait d'une loi de faible importance, malgré l'engagement de la procédure accélérée qui assure qu'il n'y aura qu'une seule lecture parlementaire :

Un détail qui, comme d'autres, en dit long sur la volonté politique de limiter au maximum les discussions sur un texte qui prévoit pourtant de donner aux services de renseignement français des pouvoirs très élargis pour espionner les communications électroniques du monde entier, et même dans certaines circonstances d'espionner des communications en France.

Le rapport préparé par la députée Patricia Adam était exceptionnellement court, le choix de passer par une proposition de loi évitait au Gouvernement de présenter une étude d'impact de la loi, et les débats en commission ont été réduits à la portion congrue, comme l'a condamné La Quadrature du Net dans un communiqué.

"Patricia Adam avait reçu La Quadrature du Net en audition le 22 septembre dernier, à notre demande. Nous avons à peine pu défendre nos arguments, nous heurtant à un mur de refus de compréhension et à un spectacle de regards tour à tour méprisants ou indignés", raconte l'association. "Nos tentatives d'explications techniques sur l'inanité d'une séparation entre surveillance « nationale » ou « internationale », nos remarques sur la nomination de M. Francis Delon à la tête de la CNCTR ou l'expression répétée de nos inquiétudes face à la légalisation explicite d'une surveillance massive se sont toutes heurtées à une porte close : dès avant la discussion parlementaire, Patricia Adam nous avait ainsi dit qu'elle n'accepterait que des amendements rédactionnels sur cette loi."

Comme avec le régime des boîtes noires prévu en France, la proposition de loi prévoit notamment la possibilité de mettre en place des "traitements automatisés" pour réaliser une "exploitation non individualisée des données de connexion". En clair, réaliser une surveillance de masse pour tenter de trouver, par méthodes statistiques, des communications dignes d'intérêt. Mais ce ne sera plus, cette fois, limité au seul terrorisme. Le tout serait très légèrement contrôlé par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), qui ne sera pas consultée en amont, contrairement à ce qui prévaut pour le renseignement interne.

Or le droit international impose de respecter l'universalité des droits de l'homme et donc de garantir de la même façon la protection de la vie privée de ses nationaux et la vie privée des étrangers, où qu'ils soient. Le Gouvernement l'avait lui-même reconnu en partie lors des débats sur la loi Renseignement en faisant rejeter une disposition qui discriminait entre Français et étrangers en France.

Le texte, qui sera sans aucun doute adopté sans heurts au Parlement, est pourtant regardé avec craintes et critiques par des associations du monde entier. "Le gouvernement de la France cherche à se donner – et à la NSA – carte blanche pour espionner le monde", a notamment attaqué la très respectée Electronic Frontier Foundation (EFF)

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