Les livres numériques devront être vendus en France avec un taux de TVA de 20 %, alors que les mêmes livres au format papier pourront être vendus au taux de 5,5 %. Ainsi en a jugé la justice européenne, dans une application rigoriste de la directive TVA, devenue anachronique.

Mauvaise nouvelle pour les éditeurs de livres, mais aussi et surtout pour les lecteurs. Alors que la loi française fait que les livres papier doivent déjà être vendus plus chers sur Internet qu'en librairie, voici que la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) porte un coup dur contre les livres numériques. Dans un arrêt rendu ce jeudi 5 mars 2015, la Cour a donné raison à la Commission européenne, qui avait contesté l'application par la France et le Luxembourg du taux réduit de TVA sur les e-books.

En pratique, les livres électronique devront donc être vendus avec un taux de TVA à 20 %, et non au taux de 5,5 % qui était appliqué depuis 2012.

La CJUE a adopté une lecture littérale de la directive TVA (.pdf), qui dispose que le taux réduit déterminé par chaque état membre ne peut être appliqué qu'aux seules livraisons de biens, ou aux prestations de services limitativement déterminées dans une annexe. Or cette annexe mentionne "la fourniture de livres, sur tout type de support physique". Il fallait donc interpréter la directive pour savoir si le fait qu'un livre électronique nécessite un support physique (tablette, smartphone, ordinateur, liseuse…) était suffisant à le faire entrer dans la catégorie des produits et services éligibles au taux de TVA réduit. La réponse est non.

PAS DE NEUTRALITÉ TECHNOLOGIQUE POUR LA TVA

"Si, certes, le livre électronique nécessite, aux fins d’être lu, un support physique (comme un ordinateur), un tel support n’est cependant pas fourni avec le livre  électronique, si bien que l’annexe III n’inclut pas dans son champ d’application la fourniture de tels livres", résume la Cour.

De plus, la directive exclut explicitement la TVA réduite pour tous les "services fournis par voie électronique", auxquels appartiennent les services de téléchargement ou de lecture à distance de livres numérisés. La France et le Luxembourg avaient tenté d'argumenter qu'un livre électronique était un bien, et non un service, mais la CJUE estime que "seul le support  physique permettant la lecture des livres électroniques peut être qualifié de « bien corporel », un tel support étant cependant absent lors de la fourniture de livres électroniques".

Aussi, la directive et son application échappent au principe de "neutralité technologique" qui devrait accompagner toute législation. De façon totalement absurde et contraire également aux intérêts environnementaux, les livres imprimés, qui nécessitent de l'encre, du papier, de l'énergie à chaque impression, et du transport routier, peuvent continuer à bénéficier d'une TVA réduite à 5,5 %, alors que les livres numériques au bilan carbone bien plus favorable doivent être facturés avec une TVA de 20 %.

En toute logique, le raisonnement de la CJUE devrait aussi s'appliquer à la presse en ligne, qui bénéficie depuis fin 2014 d'un taux de TVA réduit, contre l'avis de la Commission européenne. 


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