Avant la fin de son mandat, Donald Trump décoche ses ultimes flèches à l’encontre de la Chine. Selon Reuters, dans son édition du 30 novembre, le président américain doit ajouter de nouvelles entreprises chinoises dans sa liste noire, dont le fondeur Semiconductor Manufacturing International Corporation (SMIC), l’un des principaux producteurs locaux de semi-conducteurs.
L’ajout de SMIC à la liste noire des États-Unis n’est aujourd’hui pas confirmé. Il n’est pas non plus indiqué à quelle date cette inscription aurait lieu. Cependant, la mise à l’index de SMIC ne constituerait pas une surprise au regard de la politique suivie depuis quelques années par l’actuelle administration américaine. Dès 2018, une guerre commerciale entre Washington et Pékin s’est mise en place.
Que SMIC soit exclu des investissements américains ou non, le président-élu Joe Biden héritera d’une situation bilatérale déjà dégradée. Il n’est toutefois pas du tout sûr que le nouveau chef de l’État adoucisse vraiment cette ligne dure, sauf peut-être dans les formes. La mobilisation face à l’émergence de la Chine comme superpuissance s’avère être l’un des rares points de consensus aux USA.
Huawei, victime collatérale
Indirectement, les restrictions que pourrait subir SMIC sont susceptibles de nuire, entre autres, à Huawei. L’entreprise chinoise, dont le business dans les smartphones s’est récemment effondré en Europe de l’ouest à cause des sanctions mises en place par les autorités américaines, cherche en effet une porte de sortie pour ré-accéder à du matériel de pointe dans les semi-conducteurs.
SMIC n’est toutefois pas au niveau des leaders du domaine — il a la capacité de graver des puces avec une finesse de 14 nanomètres, là où des géants comme Samsung, TSMC et Intel sont déjà positionnés sur des processus de gravure en 5 nm et se déploient petit à petit dans le 3 nm. L’écart entre les trois de tête et SMIC s’élève à plusieurs années de recherche et développement.
Des rumeurs survenues cet automne laissent entendre que Huawei aurait conclu un deal avec l’équipementier américain Qualcomm, mais cela n’a pas été confirmé. L’accord porterait sur le modèle Snapdragon 875, qui est gravé en 5 nm. La puce serait conçue par ARM (une entreprise britannique, en cours de rachat par l’Américain Nvidia) et produite par le Sud-Coréen Samsung.
La Chine reste très dépendante des semi-conducteurs
Les efforts américains contre SMIC, et donc pour empêcher la Chine de se doter, du moins rapidement, d’une industrie de pointe dans les semi-conducteurs, ne sont pas récents. À titre d’exemple, Le Monde signalait cet été que l’administration Trump a fait pression sur les Pays-Bas pour empêcher ASML, un fabricant local de machines servant dans les semi-conducteurs, de faire des affaires avec SMIC.
Comme le faisait remarquer en juillet Antoine Bondaz, chargé de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique et spécialiste de la Chine, Pékin sait « depuis des décennies que sa dépendance aux technologies étrangères est une vulnérabilité qu’il lui faut résoudre ». Or, la décision cet été du Taïwanais TSMC de ne plus travailler avec Huawei pourrait être un coup fatal à l’entreprise chinoise.
La grande dépendance de la Chine à l’égard des semi-conducteurs a été illustrée par un comparatif éloquent : le pays importe en effet plus de semi-conducteurs que de pétrole, en valeur. Si le pays s’emploie à combler son retard technologique et à faire émerger ses fleurons, le retard par rapport à l’état de l’art est encore prononcé. Et de toute évidence, les États-Unis le savent. Et en jouent.
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