Alertée par l'UFC-Que Choisir en septembre, l'autorité de régulation des télécommunications attend désormais d'être saisie par YouTube ou Free. Ces derniers sont en conflit depuis plusieurs années, chacun accusant l'autre de ne pas faire assez pour s'interconnecter. Résultat, les abonnés chez Free accèdent à YouTube avec difficulté aux heures de pointe.

Les abonnés haut débit de Free peuvent en témoigner : aux heures de pointe, le chargement des vidéos sur YouTube est particulièrement difficile. En cause, l'interconnexion entre le fournisseur d'accès à Internet français et la plate-forme de vidéos américaine. Sur fond de désaccord financier, chacun rejette sur l'autre la responsabilité des désagréments rencontrés par les clients de Free Mobile.

Pour l'opérateur, Google n'investit pas suffisamment dans les infrastructures en France pour fluidifier l'écoulement des données entre YouTube et les abonnés. Pour le géant du web, les opérateurs français n'ont qu'à ouvrir leurs locaux pour que celui-ci puisse y déployer ses propres serveurs permettant de répliquer les vidéos les plus consultées par les internautes.

Le mois dernier, l'UFC-Que Choisir a décidé de taper du poing sur la table pour mettre un terme à un différend qui n'a que trop duré. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a été saisie, tout comme les services de Benoît Hamon, en charge de la consommation, et l'Autorité de régulation des communications électroniques.

Depuis, le dossier n'a guère avancé. Le magazine Les Échos rappelle en effet que c'est aux parties concernées de saisir le régulateur des télécommunications. Dans le cas contraire, il lui est impossible d'ouvrir une procédure pour déterminer les responsabilités de chacun et, surtout, régler un conflit qui dure déjà depuis quelques années et qui frustre au plus haut point les internautes.

L'interconnexion entre les acteurs de l'Internet intéresse depuis longtemps l'Arcep. En mai dernier, elle a notamment lancé une consultation publique dans laquelle ce sujet est abordé. L'Arcep notait alors que la taille des tuyaux et la tarification dans le milieu engendrent des "tensions" et conduisent à des frictions affectant directement les abonnés.

Pour Google, le problème pourrait être rapidement résolu si les opérateurs le laissait s'installer chez eux. Mais ces derniers craignent d'une part de perdre la maîtrise de leur réseau et d'autre part de perdre un gros client, puisque les FAI vendent justement des services dédiés à la réplication de contenus. Donc pouvant servir à dupliquer des vidéos hébergées sur YouTube.

En France, rappelle Les Échos, les opérateurs doivent communiquer au régulateur des informations relatives à l'interconnexion, notamment le trafic entrant et sortant avec tous les opérateurs de gros et tous les fournisseurs de services et de contenus en ligne. Or, la récente décision rendue par l'Autorité de la concurrence dans l'affaire opposant Orange à Cogent pourrait s'inviter dans les débats entre Free et YouTube.

Dans son avis, l'Autorité de la concurrence estime que l'opérateur historique peut demander à être rémunéré pour ouvrir de nouvelles capacités d'interconnexion, si les échanges de trafic avec un autre acteur de l'Internet sont trop asymétriques et à son désavantage. C'est le cas avec Cogent, qui a fourni notamment MegaUpload. Cette décision a été saluée par Orange, qui au passage s'est félicité d'une victoire sur le dogme absolu de la neutralité du net.

Or, il semble évident a priori que les échanges de trafic entre Free et YouTube sont clairement déséquilibrés, ce qui pourrait aboutir potentiellement à un résultat similaire à celui enregistré dans le conflit entre Orange et Cogent.

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