Vous connaissez probablement les arômes caractéristiques de l’herbe coupée. Mais d’où vient cette odeur printanière ? La réponse est plus tragique que vous le pensez. Il s’agit en fait d’un mécanisme de défense et d’un appel à l’aide destiné à certains insectes.

C’est le printemps, vous venez de tondre votre jardin et profitez de la douce odeur qui se dégage des herbes coupées. Mais vous êtes-vous déjà demandé d’où venait cette senteur ? Savez-vous que cette réaction chimique est surtout un signal de détresse ?

Eh oui : l’herbe mutilée s’en sert pour exprimer le véritable traumatisme que vient de lui infliger votre tondeuse à gazon. Et il ne s’agit pas seulement d’une plainte : ces substances volatiles servent aussi de protection aux brindilles d’herbes décapitées.

Un signal chimique odorant

L’odeur de l’herbe fraichement coupée provient des composés organiques volatils (COV) synthétisés par les végétaux. ll s’agit d’un signal chimique, libéré par la plante lorsqu’elle est endommagée. En s’évaporant dans l’air, il donne cette senteur que vous associez probablement au printemps.

L'odeur de l'herbe coupée est un signal de détresse. // Source : Flickr/CC/Daniel Pink (photo recadrée)

L'odeur de l'herbe coupée est un signal de détresse.

Source : Flickr/CC/Daniel Pink (photo recadrée)

« L’émission de COV par les végétaux est un mécanisme très répandu, nous explique Christophe Robin, chercheur à l’Inra et directeur du Laboratoire Agronomie et Environnement. Les composés organiques volatils sont un moyen majeur d’identification des plantes pour les insectes herbivores. »

En temps normal, les composés organiques volatils sont émis en faible quantité. Cependant, lorsque la plante est soumise à une « défoliation mécanique, comme lorsque vous passez la tondeuse », les émissions sont beaucoup plus importantes, nous explique le chercheur. Cela peut aussi se produire lorsqu’un animal, comme une vache ou un insecte, fait du végétal son festin.

Les substances volatiles des feuilles (« Green Leaf Volatiles ») font partie des composés organiques volatils. « Quand la plante est détruite, les acides gras libèrent les GLV sous l’action d’enzymes [ndlr : des protéines] », poursuit le spécialiste des plantes. Ces dérivés d’acides gras, composés d’alcools ou d’esters, sont responsables de l’arôme caractéristique de l’herbe taillée.

Le signal chimique est libéré par la plante endommagée par la tonte. // Source : Pixabay/CC0 (photo recadrée)

Le signal chimique est libéré par la plante endommagée par la tonte.

Source : Pixabay/CC0 (photo recadrée)

Attirer les insectes à la rescousse

Ce mécanisme de défense vise d’abord à repousser des organismes qui pourraient nuire à la plante, comme des champignons ou des bactéries.

Plus surprenant encore : les brindilles d’herbe se servent aussi de ce signal d’alerte pour attirer certains insectes à la rescousse. Cette découverte a été faite en 2014 au sein de la Texas A & M AgriLife Research, une agence spécialisée dans l’agriculture et les sciences rattachée au système universitaire A & M du Texas (États-Unis).

L’ennemi de son ennemi est son ami

« Les GLV issus des plantes sont perçus par les agresseurs des insectes herbivores qu’on appelle des auxiliaires, explique Christophe Robin. Une relation tripartite s’instaure alors entre la plante, son agresseur et l’agresseur de l’agresseur. L’ennemi de son ennemi est son ami. » La brindille anticipe la possibilité qu’elle puisse être dévorée et se protège en attirant d’autres insectes — qui raffolent des prédateurs herbivores.

« On parle d’écologie chimique », conclut le spécialiste pour décrire ces composés qui servent de signal et de médiateur chimique — régissant les interactions entre espèces. Vous pourrez donc penser à cette subtile alliance entre plantes et insectes la prochaine fois que vous passerez la tondeuse sur l’herbe odorante.

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