Que se serait-il passé, si Internet avait existé en 1940 ? Alors que le journaliste Nelson Monfort imagine le pire, il est permis d'imaginer le meilleur…

Que se serait-il passé si Internet était né en 1917 à Leidenstadt ? Sur MFM Radio, le journaliste sportif Nelson Monfort a expliqué qu'il avait peur d'internet, car même s'il reconnaît qu'il s'agit d'un certain côté de "la meilleure des inventions", il considère que c'est aussi la pire du fait de l'anonymat qu'il offre. "C’est également la pire des inventions parce qu’elle permet de faire toute une série de choses anonymes, que je trouve d’une lâcheté et d’une petitesse jamais vue jusqu’ici. Je n’ose imaginer ce qui se serait passé si internet avait existé entre 1940 et 1944. Déjà qu’il y avait toute une série de lettres de dénonciation, par centaines de milliers, de voisins, des choses abominables… Je n’ose imaginer, et je préfère ne pas l’imaginer", a-t-il déclaré, selon les propos rapportés par Voici. Lequel dénonce un point Godwin.

Mais les propos de Nelson Monfort méritent de s'y arrêter en poussant plus loin la réflexion.

Car oui, Internet aurait certainement facilité la délation. Mais il l'aurait fait dans les deux sens. Sans doute que si Internet avait existé au moment de la guerre, il n'aurait pas fallu attendre 1944 et la libération de la Pologne par l'Armée Rouge pour découvrir l'horreur des camps d'extermination nazis, dont l'ampleur n'a été mesurée qu'en 1945. Elle aurait été connue bien avant, ou aurait été arrêtée de l'intérieur.

Car sans doute que dans une Allemagne aux médias traditionnels verrouillés, aux populations embrigadées dans une propagande sans alternative, des soldats nazis et la résistance allemande auraient pu utiliser un outil décentralisé comme Internet pour alerter anonymement le reste du monde, et surtout pour mobiliser les populations locales contre le pouvoir national-socialiste. Il aurait pu offrir aux opposants au nazisme un contre-poids médiatique essentiel pour faire comprendre aux Allemands que les Juifs n'étaient pas responsables de tous les maux, et que la politique expansionniste était une folie.

C'est aussi pour cela que le droit à l'anonymat est une composante essentielle de la liberté d'expression, et qu'il faut le protéger même s'il fait peur. Comme le savent tous les opposants aux régimes autoritaires qui se servent actuellement d'Internet, de la Chine à la Syrie, en passant par la Tunisie et l'Egypte, l'anonymat est une garantie de sécurité. Et Internet est une chance unique de contre-carrer la parole officielle de l'Etat.

Alors que le cinéma antisémite était une arme du pouvoir nazi, Internet aurait aurait permis qu'un film comme Le Dictateur de Chaplin, qui avait été censuré en Allemagne, circule de mains en mains grâce au P2P ou aux YouTube de l'époque. Et que des citoyens de toutes les contrées du monde, y compris en Allemagne, créent leurs propres vidéos pour les montrer aux Allemands. L'écrivain Erich Maria Remarque, dont l'ouvrage pacifiste sur la première guerre mondiale avait été brûlé par les nazis lors des autodafés de 1933, aurait été lu sur son blog ou à travers des copies pirates accessibles en ligne.

A condition de bénéficier d'un Internet libre.


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