Le député UMP Patrice Calméjane demande que les FAI et opérateurs mobiles aient l’obligation de filtrer par défaut les contenus auxquels ne devraient pas accéder les mineurs, et de ne permettre leur accès que si le majeur titulaire de l’abonnement le demande explicitement. Une proposition excessivement dangereuse

Le député Patrice Calméjane (UMP) a une brillante idée. Le député demande au ministère de l’économie, des finances et de l’industrie s’il « ne pourrait pas être envisagé que les logiciels de contrôle parental soient automatiquement installés par les fournisseurs afin que des mineurs ne soient confrontés à des sites réservés aux majeurs« . L’élu de Seine-Saint-Denis veut en effet mettre l’accent sur « l’importance de la mise en place des logiciels de contrôle parental sur les smart phone et ordinateurs pour permettre aux parents de filtrer l’accès à internet« , et s’inquiète du fait que « les parents ne pensent pas systématiquement à l’activer« .

L’idée brillante est donc de donner aux opérateurs mobiles et aux fournisseurs d’accès à internet le soin, non seulement de proposer le filtrage directement au niveau de leurs infrastructures réseau, mais aussi de l’activer par défaut. « En inversant ainsi la mise en fonctionnement du logiciel, et en rendant possible sa désactivation sur simple demande de la personne majeure titulaire de l’abonnement, les précautions sont prises en amont« , se félicite le député.

Mais son idée est excessivement dangereuse pour la liberté d’expression et de communication, et la vie privée.

Quels seront les sites ou les contenus inaccessibles par défaut ? Se limitera-t-on aux seuls sites pornographiques, ou aussi à des contenus d’autre nature ? Quelle sera la liberté réelle de l’utilisateur qui devra téléphoner à son opérateur pour dire qu’il souhaite accéder à un site pornographique, nazi, ou d’incitation à la violence, même s’il en a des motifs parfaitement légitimes ? Les FAI se contenteront-ils d’un bouton « on/off », ou devront-ils aller dans le détail pour libérer l’accès catégorie de sites par catégorie de sites ? Les autorités pourront-elles connaître la liste de tous les utilisateurs qui ont demandé à accéder à telle ou telle catégorie de sites ? Le CSA, qui rêve de réguler Internet, saura-t-il sur un tel dispositif en interdisant la désactivation de certains filtrages ? Quelles seront les méthodes technologiques employées pour vérifier la nature du contenu consulté par l’internaute, et décider de son blocage ?

L’idée n’est pas nouvelle. En juillet dernier, le député Christian Vanneste (UMP) avait lui aussi proposé que les FAI filtrent la pornographie par défaut. De son côté, même s’il se montre prudent sur le filtrage imposé au niveau des fournisseurs d’accès, le gouvernement a annoncé cet été qu’il travaillait avec l’AFNOR sur une notation des logiciels de contrôle parental des FAI. Ces derniers doivent obligatoirement être proposés par les FAI, mais sous forme de logiciels installés sur le poste de travail de l’internaute, et non sous forme de services contrôlés directement par le FAI au niveau des infrastructures.

La proposition du député Calméjade démontre aussi toute la dangerosité potentielle de l’Hadopi, qui impose la sécurisation de l’accès à Internet sous peine de suspension. L’abonné qui demande la désactivation du contrôle parental activé par défaut par son FAI sera-t-il considéré comme coupable de négligence caractérisée si son adresse IP est utilisée pour pirater ?

Sur ce point, la Haute Autorité qui a conscience de marcher sur des oeufs s’est montrée très prudente. « La plus grande prudence s’impose s’agissant de l’usage de techniques de reconnaissance de contenus et de filtrage qui ne seraient pas imposées par des contraintes techniques de gestion des réseaux« , disait-elle en avril dernier, en réponse à une consultation lancée par Bruxelles. Néanmoins, ses travaux préparatoires à la publication des « spécifications fonctionnelles » des moyens de sécurisation n’excluent pas que le FAI proposent le filtrage sous forme de service.

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