Le rôle actif ou passif que peuvent avoir les réseaux sociaux dans les attentats terroristes va être débattu en justice. Le père d’une victime américaine des attentats de Paris de novembre 2015, Reynaldo Gonzalez, a en effet décidé de porter plainte aux États-Unis contre Facebook, Google et Twitter, pour avoir « sciemment permis » l’organisation des actions terroristes qui ont tué sa fille Nohemi.
Selon l’agence Associated Press, le père endeuillé reproche aux trois entreprises en cause d’avoir permis à l’État islamique et ses sympathisants d’utiliser leurs outils sociaux pour attirer des membres, lever des fonds, et disséminer une « propagande extrémiste ». En somme, il juge les réseaux sociaux responsables de l’endoctrinement des kamikazes qui ont fait 129 morts le 13 novembre 2015, dont 90 au Bataclan, et estime que les réseaux sociaux ont permis l’organisation matérielle des attentats.
Quelle responsabilité des réseaux sociaux ?
Il ne semble toutefois exister aucun lien direct et irréfutable entre les réseaux sociaux et les attentats, ce qui donne peu de chances de succès à l’action, immédiatement jugée « sans fondement » par Google, Twitter et Facebook. Néanmoins les entreprises admettent implicitement une part de responsabilité sociale, à défaut de responsabilité juridique, puisqu’elles ont fortement accentué ces derniers mois leur politique de répression à l’encontre des contenus ou réseaux terroristes, en adoptant face à la liberté d’expression une position plus proche de la culture européenne que de la culture américaine traditionnellement plus libérale.
Au début du mois, Facebook, Microsoft, Twitter et YouTube ont ainsi signé un « code de conduite » avec la Commission européenne, qui prévoit notamment d’agit plus rapidement lorsqu’ils reçoivent des signalements, d’éclaircir leurs politiques sur les contenus acceptés ou refusés, et de favoriser la visibilité des contre-discours. À cet égard, Google organise cet été en France une grande tournée de youtubers, avec l’organisation d’un concours de vidéos anti-extrémisme.
La question des bulles filtrantes
La plainte de Reynaldo Gonzalez, qui a été déposée mardi auprès d’un tribunal de Californie, n’est pas tout à fait la première du genre. En janvier dernier, la veuve d’un homme mort dans une attaque en Jordanie avait également décidé de poursuivre Twitter en justice, et de produire des messages en guise de preuve de ce que le réseau social aurait laissé se diffuser des propos pouvant amener à des actions terroristes. Selon AP, la plainte déposée mardi aurait de nombreuses captures d’écran identiques à l’appui, mais les avocats des deux affaires sont différents.
Si le procès a lieu, il permettra à la justice de se pencher sur la question des « bulles filtrantes » dénoncées en France par le gouvernement, c’est-à-dire que l’impact que peuvent avoir des algorithmes qui, par construction, conseillent des contenus ou contacts extrémistes à des internautes qui sont enclins à se radicaliser. C’est là la principale responsabilité des réseaux sociaux, dont le fonctionnement-même tend à enfermer l’utilisateur dans sa propre bulle idéologique, en le lui faisant plus voir que des contenus ou des personnes qui vont dans le même sens.
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