Affaiblie sur le dossier de la neutralité du net, la commission fédérale des communications reste néanmoins déterminée à peser sur les débats. Son président doit présenter les contours de la neutralité du net aux États-Unis. Mais en distinguant la nature des données et la légalité des contenus, le cadre envisagé à l’heure actuelle risque plutôt de fragiliser la neutralité des réseaux.

C’est ce mercredi que le président de la commission fédérale des communications (FCC), l’équivalent américain de l’Arcep, doit présenter les grandes lignes visant à préparer le cadre réglementaire de la neutralité du net aux États-Unis, indique le New York Times. Ces règles doivent permettre la mise en place d’une régulation des fournisseurs d’accès à Internet américains.

Selon le quotidien américain, qui a obtenu une copie du discours, le discours de Julius Genachowski « présentera un cadre pour les services Internet à haut débit qui interdit à la fois aux FAI et aux opérateurs de bloquer les contenus licites. Mais la proposition permettrait aux fournisseurs d’accès de facturer aux consommateurs des tarifs différents en fonction des « différents niveaux de service »« .

Plus loin, le New York Times indique que « la proposition autorisera les opérateurs d’imposer une tarification en fonction de l’utilisation« . Cela signifie que des abonnés paieraient plus chers s’ils consomment des beaucoup de données (comme la vidéo en streaming par exemple) par rapport à d’autres qui n’utiliseraient Internet que pour consulter des courriers électroniques et y répondre. Ces derniers paieraient moins chers parce qu’ils consomment moins de données.

Formulée ainsi, la proposition portée par la FCC est a priori respectueuse de la neutralité du net. La facturation au volume est le seul moyen de garantir la neutralité des réseaux, puisqu’il n’est plus nécessaire de gérer le trafic pour entrer dans le cadre d’un forfait illimité. En France, cette idée est défendue notamment par le FAI associatif French Data Network.

Cependant, cette piste entraine un certain nombre de problèmes. En optant pour une tarification au volume, l’accès égalitaire aux mêmes contenus n’est plus assuré. En effet, les personnes les plus riches pourront accéder plus aisément aux contenus les plus gourmands en données tandis que les personnes les plus modestes devront y réfléchir à deux fois avant de consommer des applications riches. Il s’agit alors d’une discrimination économique.

En revanche, si la FCC défend le principe d’une facturation selon la nature des données consommées, alors il s’agit d’une violation de la neutralité du net. En effet, il n’est plus question ici de facturer en fonction du volume des données, mais en fonction de leur nature. S’il s’agit de ce principe, alors c’est une discrimination puisque le tarif sera différent s’il s’agit de contenus vidéos, de la voix sur réseau IP (VoIP), du mail, du P2P ou du web.

La question se pose d’autant plus que le New York Times évoque des contenus « licites« , laissant entendre qu’il y a mécaniquement des contenus illicites. Or, ce n’est pas aux fournisseurs d’accès à Internet de déterminer quels sont les contenus licites des autres. C’est à la justice de s’en charger, afin d’entreprendre éventuellement des mesures de blocages.

Suite au discours de Julius Genachowski, la commission fédérale des communications organisera une réunion publique le 21 décembre prochain. À cette occasion, les membres de la FCC devraient se prononcer sur le cadre de la neutralité du net.

Le travail de régulation a été passablement compliqué depuis la décision d’une cour d’appel en avril dernier expliquant que la FCC n’avait pas le pouvoir de réguler la neutralité des réseaux. Depuis, la FCC a tenté de reprendre en main la gestion de ce dossier, en multipliant des réunions en marge d’une consultation publique démarrée en juin dernier. La commission a ainsi rencontré les principaux opérateurs américains, Google, Skype et l’Open Internet Coalition.

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