Dans un arrêt du 3 mai 2011, la cour d’appel de Paris a jugé que Google n’a pas à bloquer la suggestion des termes « torrent », « RapidShare » ou « MegaUpload » lors des recherches des utilisateurs, contrairement à ce que demandait le syndicat des majors de l’industrie musicale.

Au début de l’année, nous avions vu que certains termes associés au téléchargement étaient bloqués sur les fonctions Google Instant et Google Suggest du moteur de recherche. C’était en particulier le cas des mots BitTorrent, RapidShare, µTorrent ou MegaUpload, qui n’ont pourtant rien d’illicites en soi. Depuis les choses ont légèrement évolué puisque si ces recherches ne sont toujours pas complétées automatiquement dans la fonction « Google Suggest », qui propose des termes à rechercher à partir des premières lettres saisies, les résultats correspondants ne sont plus bloqués sur Google Instant. Ils apparaissent bien dynamiquement au fil de la saisie, comme n’importe quelle recherche.

L’an dernier, le Syndicat National de l’Edition Phonographique (SNEP) avait entamé une action judiciaire contre Google pour faire bloquer les termes Torrent, MegaUpload et RapidShare dans Google Suggest. Débouté une première fois le 10 septembre 2010 par le tribunal de grande instance de Paris, le SNEP vient à nouveau de perdre devant la cour d’appel, comme le révèle PC Inpact.

Pour poursuivre le moteur de recherche, le lobby des maisons de disques s’était reposé sur l’article L336-2 du code de la propriété intellectuelle, créé par la loi Hadopi. Il dispose qu’ « en présence d’une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d’un service de communication au public en ligne, le tribunal de grande instance, statuant le cas échéant en la forme des référés, peut ordonner à la demande des titulaires de droits (… ou de leurs représentants) toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une telle atteinte à un droit d’auteur ou un droit voisin, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier« . C’est notamment sur cette base légale que l’Hadopi devrait un jour demander aux FAI de bloquer l’accès aux sites de streaming illégaux dont elle aura démontré qu’ils sont très utilisés, grâce à l’installation de sondes chez les opérateurs.

Cependant à l’instar du juge de première instance, la cour d’appel de Paris n’a pas estimé qu’il y avait « atteinte à un droit d’auteur occasionné par le contenu » de Google Suggest, lorsque l’utilisateur recherche les termes « torrent », « megaupload » ou « rapidshare ». Le lien de cause à effet n’est pas démontré par le SNEP, puisque les termes visés ne conduisent pas automatiquement à une violation de droits d’auteur.

« L’échange de fichiers contenant des œuvres protégées notamment musicales sans autorisation ne rend pas ces sites en eux-mêmes illicites« , rappelle l’arrêt de la cour d’appel de Paris (.pdf). « C’est l’utilisation qui en est faite par ceux qui y déposent des fichiers et les utilisent qui peut devenir illicite« .

C’est pourquoi « la suggestion automatique de ces sites ne peut générer une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin que si l’internaute se rend sur le site suggéré et télécharge un phonogramme protégé et figurant en fichier sur ces sites« . Aussi, la violation du droit d’auteur n’étant pas « occasionnée » par Google mais bien par l’utilisateur, il n’est pas possible de demander à Google qu’il bloque les termes visés.

Cette décision va-t-elle convaincre Google de rétablir « BitTorrent », « torrent », « utorrent », « MegaUpload » ou encore « RapidShare » dans les termes suggérés ? Rien n’est moins sûr. D’autant que le SNEP a encore possibilité de se pourvoir en cassation.


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