On dit de lui qu’il pourrait autoriser la fouille des disques durs aux frontières, qu’il pourrait limiter la commercialisation des médicaments génériques dans les pays en développement, qu’il pourrait obliger les fournisseurs d’accès à Internet à collaborer au contrôle des réseaux et accentuer les sanctions pénales contre les pirates. Mais le traité ACTA reste confidentiel, et aucun état ne confirme ou ne dément les rumeurs. Aux Etats-Unis, des organisations de défense des droits civils poursuivent le gouvernement américain pour lever le secret.

Le sujet ne semble intéresser personne en France. A l’heure où nous publions ces lignes, selon Google News, seul Numerama a consacré un article à l’appel lancé par une centaine d’organisations de défense des intérêts publics (dont Médecins sans frontières) pour lever le secret sur le traité ACTA, actuellement négocié par un club d’états riches et par l’Union Européenne. Le texte, pourtant, est d’importance.

15 ans après l’ADPIC négocié à l’Organisation Mondiale du Commerce, l’Accord de Commerce Anti-Contrefaçon (ACTA) devrait encore accentuer la protection des droits de propriété intellectuelle (droit d’auteur, brevets, dessins et modèles, marques…), par le mécanisme bien connu du traité international. Une fois le traité négocié entre eux par les pays du nord, il sera présenté pour signature aux pays du sud, sous la menace de sanctions économiques s’ils ne l’appliquent pas. Ensuite, les parlementaires de chaque pays auront l’obligation juridique de le transposer en droit national, en ne pouvant modifier les dispositions qu’à la marge. Le public, lui, n’aura pas son mot à dire.

Un débat public sur la négociation du traité est donc non seulement souhaitable, mais indispensable. Or l’omerta est de mise sur le sujet. Aucun des pays présumés engagés dans la discussion ne souhaite communiquer sur le contenu ou les objectifs du traité, alors-même que des lobbys pharmaceutiques, des lobbys culturels et industriels semblent avoir participé aux travaux préparatoires, et influencé le contenu du projet.

S’il n’intéresse pour le moment personne en France, le projet de traité soulève néanmoins plus d’inquiétude aux Etats-Unis. L’Electronic Frontier Foundation (EFF) et l’organisation Public Knowledge annoncent ainsi qu’ils ont déposé une une plainte contre le gouvernement américain, pour exiger que des informations soient communiquées pour lever le secret qui entoure le traité. Ils s’appuient sur le Freedom of Information Act (FOIA) qui permet aux citoyens américains de se faire communiquer des documents administratifs – un droit qui existe également en France via la CADA.

« L’absence de transparence dans ce processus [de négociation] est incroyablement alarmante« , s’indigne l’avocat de Public Knowledge Sherwin Siy. « Quelle que soit la forme que prend l’ACTA au final, nous pouvons être certains qu’il sera utilisé pour justifier davantage de traités internationaux et de lois. Le texte de l’accord doit être rendu public pour s’assurer qu’il n’empiète pas sur les droits des utilisateurs, des consommateurs et des citoyens pour accéder à la connaissance, à l’information et à la culture« .

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