Si vous ne voulez pas que votre inactivité parlementaire soit connue du plus grand nombre, mieux vaut s’abstenir de mettre de l’huile sur le feu lorsqu’un site spécialisé dresse de vous un portrait peu flatteur. Mais Sylvia Pinel, députée PRG (centre gauche) du Tarn-et-Garonne, ne connaît pas ce conseil de sagesse…

Depuis plusieurs semaines, agacés par la tenue des débats sur la loi Hadopi, les initiatiateurs du site DeputesGodillots.info dénoncent quotidiennement ceux des députés qui ne viennent pas dans l’hémicycle pour débattre et comprendre la loi mais simplement pour lever la main au moment des votes, dans le sens voulu par leur groupe parlementaire. Très rapidement, les députés ont eu vent de l’initiative et certains avaient même obtenu de la conférence des présidents qu’elle fasse interdire provisoirement l’utilisation du trombinoscope dans les tribunes de l’Assemblée. Ce petit livre rassemble les photographies et biographies des députés, pour permettre au public qui suit les débats de savoir qui s’exprime. Aujourd’hui, ils se disent en plus victimes « d’intimidations juridiques« .

La députée du Parti Radical de Gauche Sylvia Pinel a fait transmettre aux administrateurs du site une mise en demeure de « retirer [du] site internet les pages concernant Madame PINEL« . Dans cette lettre, la députée reproche au site les « commentaires » et les « photographies » que DeputesGodillots a publié sur la page qui lui est consacrée, et menace de les poursuivre devant les juridictions pénales, avec le risque d’amendes pouvant aller jusqu’à 100.000 euros.

Contacté par Numerama, le site nous précise que la députée souhaite porter plainte sur la base de quatre chefs d’accusation : injure publique, diffamation, violation du droit à l’image et du respect de la vie privée.

Réalisée d’après des notes prises à l’Assemblée, la page consacrée à Sylvia Pinel montre des photos de la députée dans l’hémicycle en train de lire un livre ou de dormir, tandis que les commentaires témoignent de l’activité parlementaire de l’élue : « Vote avec son groupe sans prêter attention, oublie parfois même de voter« , « 22H00 – Traite son courrier » ; « 22H50 – Tape un long SMS sur l’un de ses deux téléphones portables« , « 23H10 – Retour en hémicycle, s’occupe à nouveau de son courrier et de ses textos« , « 01H30 – Ecrit un dernier texto« …

Lorsque la page a été publiée sur DeputeGodillots.info le dimanche 10 mai, une partisante de Mme Pinel était intervenue dans les commentaires pour la défendre, se disant alors « scandalisée par vos méthodes et votre acharnement contre la plus jeune députée de l’assemblée qui a le mérite d’être présente là où la grande majorité des députés n’ont pas jugé nécessaire d’assister à des débats aussi importants que ceux de la loi HADOPI« . Mais le débat a tourné court lorsque Teymour, l’un des co-fondateurs du site, a répliqué que « les députés ne participant pas au débat ne sont pas utiles« , et que « cette députée [n’est] jamais intervenue en commission alors que la moyenne à ce jour des interventions par député est de 15,96« .

« Le débat avait commencé à s’instaurer« , rappelle ainsi Roux, l’autre co-fondateur du site. Mais « plutôt que de venir y participer avec les citoyens, [Sylvia Pinel] préfère utiliser la pression juridique. Ce sont des méthodes surprenantes venant d’une représentante élue rompue aux arts du débats !« , commente-t-il.

Loin de se laisser intimider, les créateurs de DeputesGodillots ont choisi de laisser la page en place et de laisser la députée mettre en œuvre ses menaces, si elle souhaite les concrétiser.

« Ce que nous ne comprenons pas dans la lettre de Madame la députée, c’est qu’elle semble confondre son rôle d’élue de la nation et sa vie privée. Un des arguments majeurs de son attaque porte en effet sur le respect de la vie privée. Nous avons du mal à voir le lien entre ceci et son travail parlementaire ou ses activités d’élue siégeant en hémicycle« , indique Teymour.

« Elle essaye en fait de nous faire taire en jouant l’intimidation juridique. Nous préférerions qu’elle nous donne l’occasion de corriger sa fiche avec son travail parlementaire plutôt que par des pressions !« 


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