En 2022, Stellantis avec ses 14 marques — dont Peugeot, Citroën, Fiat, Jeep, Opel — avait lancé une stratégie ambitieuse de passage au 100 % électrique à l’horizon 2030. Ce plan nommé « Dare Forward » était porté par son patron de l’époque Carlos Tavares, pourtant longtemps considéré comme électro sceptique. Toute l’entreprise a été mise au pas pour accélérer la transition du groupe vers l’électrique.
Les premiers signes d’essoufflement de cette stratégie étaient déjà visibles en 2024. Depuis le départ forcé de Carlos Tavares à la tête de l’entreprise le 1er décembre 2024, ils sont encore plus marqués avec l’intérim assuré par John Elkann, en attendant la nomination imminente d’un nouveau patron. Dans un article du 14 mai, Les Échos partagent des indiscrétions internes qui confirment ce revirement.
Une stratégie à l’arrêt… faute de capitaine ?
Stellantis traverse actuellement une zone de turbulences. Alors que le groupe était porté aux nues pour sa stratégie et ses résultats financiers remarquables, les cadavres empilés dans les placards ont fini par rejaillir au grand jour, plongeant l’entreprise dans une situation bien moins enviable et poussant au départ de son patron. En attendant l’annonce du successeur de Carlos Tavares, John Elkann assure l’intérim en limitant les points de tension, mais la question de la transition vers l’électrique est au cœur d’un grand chantier interne. Officiellement, aucun changement stratégique n’a été acté. Officieusement, c’est une autre histoire.
Selon Les Échos, le message est passé aux syndicats lors de réunions fin avril : l’objectif de ne vendre que des voitures électriques en 2030 n’est « plus d’actualité ». Et aucune nouvelle date n’a été avancée. Traduction : le plan « Dare Forward » porté par Carlos Tavares est gelé, sans qu’un nouveau cap soit encore annoncé.
Dès le départ du patron, le conseil d’administration a clairement pris ses distances avec l’agenda électrique. « Dès que nous avons sorti Carlos Tavares, nous avons pris son contrepied sur ce sujet », confie une source citée par le quotidien économique. Ambiance.
Ventes décevantes, plateforme hybride et commandes revues à la baisse
La raison est simple : les ventes de véhicules électriques sont en dessous des attentes. Les principaux modèles lancés en électrique ces dernières années ont vu leurs ventes chuter en 2024, et le début 2025 n’est guère plus encourageant, même si quelques nouveautés tirent un peu le groupe. L’assouplissement des objectifs européens de CO₂ (norme CAFE) ne les incite pas vraiment à forcer le pas. Stellantis a d’ailleurs acheté des crédits carbone à Tesla pour éviter les amendes européennes.
La future plateforme STLA Small, qui devait être 100 % électrique, sera finalement multi-énergie comme tous les projets Stellantis. L’hybride fonctionne bien au sein du groupe, si bien que Stellantis a décidé de capitaliser un maximum sur cette technologie. Une stratégie qui apparaît très court-termiste et pourrait coûter cher au groupe d’ici quelques années.
Le changement se mesure déjà dans les usines. Les commandes de moteurs électriques à la coentreprise Emotors ont été revues à la baisse deux fois depuis janvier. À Metz, les prévisions de production sont passées de 800 000 à une fourchette de 400 à 500 000 moteurs. Pendant ce temps, les lignes thermiques tournent à plein régime (ou presque).
Le gel du plan « Dare Forward » n’est pas qu’un contretemps : c’est un signal d’alerte. En pariant sur l’hybride et en reculant sur l’électrique, Stellantis joue la montre… mais risque de rater le train de l’innovation
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