C’est presque sans surprise que la nouvelle est tombée, à l’occasion d’une interview exclusive donnée par Mark Zuckerberg à l’agence de presse britannique Reuters le 3 avril 2018. Le patron de Facebook y a précisé que l’entreprise avait dans l’idée d’étendre certaines garanties promises par le droit communautaire, mais que des exceptions seraient établies.
Cette déclaration intervient dans un climat d’intense défiance vis-à-vis du réseau social, tandis que de nombreux acteurs pressent le géant d’adopter un règlement similaire à celui du RGPD, considéré comme la plus importante et ambitieuse refonte du droit à la vie privée numérique depuis l’avènement d’internet.
Une orientation « dans l’esprit » du RGPD
Questionné à ce propos, Mark Zuckerberg a répondu être en accord avec les principes édictés par le Règlement européen et que les nouvelles règles de Facebook – toujours en préparation – devraient reprendre « dans l’esprit » les lignes directrices du RGPD. « Nous sommes toujours en train d’ajuster les détails, mais cela devrait être globalement dans cet esprit », indique-t-il. La précision a de quoi interroger, d’autant plus que le PDG n’a pas souhaité révéler les exceptions qui ne suivront pas la politique du RGPD.
Malgré les demandes pressantes d’usagers à travers le monde, rien n’oblige légalement Facebook à appliquer les règles du droit de l’Union européenne hors de celle-ci. Comme le rappelle l’article 3 consacré au champ d’application territorial, le Règlement n’a vocation à s’appliquer qu’aux personnes se trouvant sur le territoire de l’Union européenne et cela même si le responsable du traitement est établi à l’étranger, tant qu’il offre des biens ou des services aux personnes concernées.
Un infléchissement regrettable mais s’inscrivant de manière logique dans la pensée entretenue par Mark Zuckerberg qui, pour rappel, déclarait à Tim Cook dans une interview accordée à Vox : « Avoir un modèle basé sur la publicité est le seul modèle rationnel qui peut assurer la construction de ce service . »
À l’avenir, une application envisageable ?
Cette logique est économique : il ne serait pas rentable pour l’entreprise d’adopter les mêmes règles à l’international. On se souvient que 97 % du chiffre d’affaires de Facebook provient de ses recettes publicitaires, dont une bonne partie est générée par la vente des données de ses utilisateurs.
« Les États devront se mobiliser pour aboutir à la création d’un traité international »
Pour espérer bénéficier des mêmes garanties que les résidents de l’Union européenne, les pays tiers doivent alors envisager élaborer des lois internes protectrices des données personnelles. Sinon, les États devront se mobiliser pour aboutir à la création d’un traité international qui obligerait ces multinationales quasiment inébranlables à se conformer au respect de la vie privée numérique de leurs citoyens.
Une idée quasiment impensable, tant l’on connaît les divergences juridiques opposant, à titre d’exemple, la pensée française et états-unienne sur les données personnelles:
- Pour la France, les données personnelles font partie des droits de la personnalité auxquels la personne ne peut renoncer (c’est ce qu’on appelle l’autodétermination informationnelle),
- Les États-Unis, en revanche, y consacrent un droit de propriété qui fait des données personnelles une véritable marchandise, disponible et commercialisable.
Ces conceptions paradoxales découlent essentiellement de différences sociologiques, les États-Unis exploitant la culture de la transparence à la différence de l’Europe qui mobilise une interprétation très stricte de la vie privée. Les partisans étrangers du RGPD devront donc poursuivre leur mobilisation dans l’attente espérée d’une application internationale.
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