On le sait, l’IA n’existe pas. En revanche, Vinvin est persuadé que nous deviendrons bientôt dépendants d’assistants personnels pseudo-intelligents. Ces Jarvis Home et autres Echo HAL organiseront notre quotidien et nous permettront d’abandonner toutes les tâches les plus pénibles.

Pour moi le match est plié, nous deviendrons tous totalement dépendants d’une « IA d’assistance personnelle » ; nous sommes en effet déjà capable de nous attacher à plus stupide que cela. Pour l’exemple, je porte très souvent une montre que possédait mon grand-père et que j’ai sauvée de l’oubli quand il est mort il y a vingt ans. Une montre qui ne fonctionne plus, bloquée à 6h10, l’heure exacte deux fois dans la journée depuis sa disparition. Je suis attaché à cette montre pour des raisons sentimentales, émotionnelles, car elle me rappelle son odeur, sa prestance et son rire. Je noue avec cet objet inanimé une interaction forte.

Voilà peut-être l'ancêtre de notre futur meilleur ami

Voilà peut-être l’ancêtre de notre futur meilleur ami

Je suis également très attaché à mon chien, Paf, un Golden Retriever d’une bêtise hors norme, mais d’une gentillesse sans égal. Je suis attaché à lui alors que nous ne parlons pourtant jamais de foot, de la vie, de la mort, de nos peurs, de nos rêves. Il est un peu comme une montre qui ne fonctionne plus, en plus poilu. Il fait partie de ma vie et nos relations m’occupent, autant que la toilette, les repas ou la rédaction d’un article. Je noue avec cette être animé une interaction subtile et douce.

Et donc si je me projette un peu et que j’imagine ma vie avec un robot-IA-assistant-coach-encyclopédie-secrétaire-confident-médecin-shopper-agenda-sono-banque, je sens qu’il va se passer un truc fort. Car cette interaction permanente, qui fait partie des besoins primaires de l’humain, fait dans le cas présent entièrement partie du cahier des charges. Avant même que j’ai décidé, ou non, de m’impliquer affectivement, je suis déjà en relation intime : la connivence est le produit. Je le vois donc, ce Jarvis façon Iron Man, m’accompagner tranquillement dans ma vie, et nouer avec moi un lien fort ; car non seulement il me parle, mais il me facilite la vie, ce que ne font ni ma montre ni mon chien.

L’assistant total me parle et me facilite la vie : ce que ne font ni ma montre, ni mon chien

Le robot humanoïde est foutu

En revanche, à l’heure où Google Assistant et Amazon Alexa se tirent la bourre, où Siri s’installe, où des challengers comme LinTO débarquent en open source, où les objets et boutons connectés s’incrustent dans chaque espace de l’entreprise et de la maison, où les agents conversationnels semblent partout s’imposer aux dépens de nos petits doigts musclés, je ne vois pas comment une bestiole désarticulée qui se cogne partout va pouvoir rivaliser. Déjà qu’on ne sait jamais où poser le sapin de Noël, je ne crois pas que l’humain s’encombrera d’un C-3PO d’un mètre soixante-et-onze au milieu du salon. Je ne pense pas que cette chose intelligente à laquelle nous allons nous attacher sera un robot qui nous ressemble.

Cette « chose » sera une voix omniprésente quasi dématérialisée qui se chargera de tout ce qui nous saoule… et la liste de ces choses est longue.

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J’imagine donc que pour Noël 2022 se trouve parmi les cadeaux un tout petit appareil de la taille d’une boucle d’oreille, dernière-née des usines de SofTesloogleZonSams, que je clippe à l’oreille et qui sait tout de moi via des capteurs indolores et invisibles. Bardé d’IA, branché à tout ce que je suis, sais et fais, ce bidule apprend de mon comportement et est voué à me simplifier la vie, me faire gagner du temps, surveiller mon alimentation, réaliser mes économies, réserver mes hôtels, répondre à mes questions, me suggérer de la musique, organiser le ravitaillement, etc.

Mon gadget, à qui je donne le nom de Simon car j’aime ce prénom, m’accompagne dehors, en forêt, dans le métro et partout où je vis. Simon s’occupe des contingences, pour me laisser peinard, à la fraîche, décontracté dans le vent, me permettant de me concentrer sur ce qui me rend heureux, l’écriture, les amis, des bonnes séries, des couchers de soleil et j’en passe. Dans ma tête, Simon est une voix d’homme douce et chaleureuse (je ne veux pas tomber dans le piège du film Her), au volume faible, mais largement suffisant, toujours là quand on a besoin de lui.

Et puis Simon, cette voix, possède lui-même son corps mécanique externalisé, un mini-droïde d’appoint, à roulettes, dont la seule fonction est de faire ce que ni Simon ni moi ne voulons ou pouvons faire. Cet androïde, je l’appelle Garfunkel, pour le plaisir. Garfunkel peut projeter des images en hologramme ou sur les murs, ramasser la poussière à hauteur de chien, diffuser du Dr. Dre à fond les ballons sur simple demande, verrouiller les portes, surveiller les alentours, devenir la main armée de mon IA, son side-car, son soutien opérationnel. Garfunkel n’a ni bras ni jambes, car je ne veux pas d’une sorte d’humain dans mon champ de vision. Cela me procure le même stress que si j’acceptais la présence d’un oncle un peu pénible qui sait tout sur tout et s’installe éternellement dans mon fauteuil favori : hors de question !

Une petite boule de services rassurante et discrète, corvéable, réparable, sans âme ni relation intime… alors là oui !

En revanche, une petite boule de services rassurante et discrète, corvéable, réparable, sans âme ni relation intime, alors là oui. Je ne crois pas à l’entrée dans nos vies d’androïdes à taille et apparence humaine, le mètre carré est trop cher et nos exigences trop intenses pour supporter des similihumains donneurs de leçons. En revanche des doudous électroniques surpuissants capables d’accompagner les IA embarquées dans nos cerveaux, je le sens bien.

C-3PO non. R2-D2 oui.

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