Viendra un jour où un ordinateur quantique sera capable de déchiffrer en quelques secondes la cryptographie qui sécurise une bonne partie de nos échanges sur Internet. Ce jour, communément appelé le Q-Day, vient toutefois avec son lot de mythes et de fantasmes. Alors qu’en est-il réellement ?

« Il arrive plus tôt que prévu », « Une apocalypse quantique dès 2025 ? », « Q-Day is near ! ».

Il suffit d’une rapide revue de la presse tech, française comme anglophone, pour saisir l’angoisse mondiale qui plane autour du Q-Day.

L’enjeu est, il est vrai, colossal. Le terme Q-Day — qui n’a rien à voir QAnon, groupuscule complotiste américain — désigne le jour où les algorithmes cryptographiques largement utilisés de nos jours deviendront vulnérables face à la puissance de calcul des ordinateurs quantiques.

En clair, le jour où une machine quantique suffisamment aboutie et stable sera capable de briser les systèmes de chiffrement utilisés au quotidien, qu’il s’agisse des mécanismes authentifiant les transactions bancaires ou ceux protégeant les communications d’infrastructures critiques comme les réseaux électriques.

Mais voilà, à rebours des scénarios catastrophistes, l’intérêt d’estimer le Q-Day n’est pas de rester les bras croisés à fixer le chronomètre jusqu’à l’explosion… Car les solutions existent déjà, et elles sont à portée de main.

Le « chandelier » à l'intérieur de l'ordinateur quantique d'IQM, en Finlande. // Source : Numerama
Le « chandelier » à l’intérieur de l’ordinateur quantique d’IQM, en Finlande. // Source : Numerama

Que doit-on attendre du Q-Day ?

Pour les spécialistes du quantique, la question n’est plus de savoir si le Q-Day arrivera, mais quand.

Et face à ce constat, une bonne nouvelle peut éclairer l’horizon des plus angoissés, résumée par Ludovic Perret, professeur d’informatique à l’EPITA et cryptographe post-quantique : « Il y a déjà des solutions post-quantiques, qui n’ont rien de quantique. »

Les outils et initiatives pour contrer les futures capacités de déchiffrement des ordinateurs quantiques sont effectivement connus, et ces dernières années, leur développement s’accélère. On voit aussi des messageries s’y pencher, comme Proton ou Signal, pour anticiper l’avènement du Q-Day, au lieu d’être pris de court.

L’enjeu n’est donc pas de réagir dans l’urgence une fois le Q-Day déclenché, mais bien de mettre en place dès maintenant les mesures nécessaires pour l’aborder avec la plus grande sérénité possible.

Encore faut-il savoir quoi changer. Car, non, tout le système de sécurité informatique actuel n’est pas à jeter aux oubliettes.

Toute la cryptographie n’est pas logée à la même enseigne

Cette phase de transition ne concerne en réalité que les échanges dits « transactionnels » sur Internet.

Pour comprendre ce qui doit être soumis à la cryptographie post-quantique, il faut distinguer deux grands types de cryptographie utilisés aujourd’hui.

La cryptographie symétrique, qui repose sur une clé secrète unique, utilisée à la fois pour chiffrer et déchiffrer les données. Cette clé commune doit être partagée entre l’expéditeur et le destinataire, ce qui assure un mécanisme sûr de distribution.

La cryptographie asymétrique, elle, fonctionne avec une paire de clés distinctes : une publique et une privée. Chaque partie n’a besoin de connaître que la clé publique de l’autre. C’est ce que l’on appelle plus communément la « cryptographie à clé publique ».

Or, ce sont uniquement ces derniers mécanismes qui sont menacés par les ordinateurs quantiques.

Quand aura lieu le Q-Day et comment s’y préparer ?

Transactions bancaires, crypto-monnaies, communications chiffrées, accès à distance… Le chantier d’adaptation qui attend le monde informatique reste colossal.

Pour sécuriser au mieux entreprises et administrations, Martin J. Kraemer, de la société de cybersécurité KnowBe4, exhorte les organisations à engager la transition « dès maintenant », et à intégrer les algorithmes post-quantiques sans attendre de connaître la date précise du Q-Day.

Cette transformation débute forcément par un vaste inventaire pour estimer quels matériels et systèmes doivent être actualisés.

Une anticipation d’autant plus cruciale que, comme le rappelle l’expert, il est fort probable que l’on ne saura peut-être pas quand l’apparition du premier ordinateur quantique opérationnel sera effective, pour des raisons qu’on devine hautement stratégiques.

Les ressources nécessaires au développement de cette technologie impliquent que « les États auront très certainement accès à cette technologie avant les cybercriminels ou les entreprises. (…) Nous n’en saurons peut-être rien », fait-il remarquer.

Impossible de dater précisément le Q-Day, mais la plupart des experts situent l’échéance entre 2030 et 2050.

Pas de scénario d’apocalypse donc, mais bel et bien une véritable course technologique que Ludovic Perret résume ainsi : « Il faudrait que le PQ-Day (Post-Quantique) arrive avant le Q-Day. »

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