Chaque samedi, c’est la compilation de l’actualité de la propriété intellectuelle et de ses dérives, concoctée par Lionel Maurel et Thomas Fourmeux. Cette semaine, un gros big up pour Citigroup et sa marque Thank You. AMC qui crie à la contrefaçon pour un spoil sur Walking Dead et un brevet sur l’urine de vache.

Copyright Madness

Vie privée. On savait que les trolls du droit d’auteur étaient prêts à tout pour pouvoir lutter contre le téléchargement illégal. Mais une fois de plus, ils ont réussi à dépasser l’imaginable pour parvenir à leurs fins. On apprend cette semaine que la Brein, une association qui regroupe des éditeurs de livres, a saisi les tribunaux pour essayer d’obtenir l’identité de deux internautes suspectés d’avoir partagés des contenus protégés par le droit d’auteur sur le réseau Usenet. Suite à ces signalements, les comptes ont été désactivés. La Brein  ne s’est pas satisfaite de cette suppression de compte et exige d’avoir accès aux données personnelles des internautes concernés. Or, la législation hollandaise prévoit qu’une fois qu’un compte en ligne est désactivé les données deviennent inaccessibles. Si les juges donnent raison à la Brein, les conséquences seraient dramatiques pour la protection de la vie privée. Cette décision introduirait une hiérarchie entre le droit à la vie privée et le droit d’auteur. Effrayant !

Mort de rire. Cela fait deux semaines de suite que nous évoquons Walking Dead dans le Copyright Madness. À ce rythme, la série décrochera son ticket pour le Worst of 2016. Cette semaine, la chaîne AMC qui diffuse la série vient de frapper fort en s’attaquant à une communauté de fans de Walking Dead. Non, on vous le dit tout de suite, il ne s’agit pas de téléchargement illégal ou de n’importe quel autre acte de contrefaçon. La communauté  The Spoiling Dead Fans, comme son nom l’indique, est spécialisée dans le spoil. Elle essaie de deviner ce qui va se passer dans les épisodes à venir. Plus particulièrement, les fans ont essayé de savoir qui était la victime de Negan à la fin du dernier épisode de la saison 6. Ils n’ont rien partagé d’autres que des suppositions mais cela a suffit pour recevoir une notification de violation au copyright ! Pour AMC, le simple fait de raconter ce qui peut éventuellement se passer constitue donc une violation au copyright. Quelle sera la prochaine étape ? Crever les yeux des spectateurs ou leur percer les tympans ?

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En musique. Le chanteur Ed Sheeran est empêtré dans une affaire de violation de droit d’auteur. Deux musiciens l’accusent de plagiat et lui réclament 20 millions de dollars de dommages. Plus précisément, les deux artistes reprochent à Ed Sheeran d’avoir utilisé dans sa chanson Photograph 39 notes identiques placées exactement au même endroit. Selon les plaignants, les deux chansons sont similaires à la fois sur le plan de la structure, du rythme et de l’harmonie. Ils auraient pu aller plus loin et l’accuser d’avoir utilisé des instruments de musique et un micro ou carrément revendiquer un copyright sur le do ou le fa…

Trademark Madness

Mauvais joueur. On avait déjà évoqué cette affaire dans une précédente chronique. Le résultat vient de tomber et malheureusement il répond aux critères pour décrocher sa place dans la catégorie trademark madness.  Julien Chauvin a fondé en 2015 l’orchestre « Le Concert de la Loge Olympique ». Cette appellation était une référence à une formation du 18è siècle. Mais cette audace n’a pas été appréciée par le Comité National Olympique Sportif Français. Et vous vous demandez naturellement quel est le lien entre une formation musicale et une organisation qui représente la France au Comité International Olympique. La réponse est assez simple et s’appelle le droit des marques. Le CNOSF considère qu’il détient un droit exclusif sur le mot « olympique ». N’ayant pas les ressources suffisantes, le Concert de la loge Olympique a pris la triste décision de changer de nom. De nos jours, ça devient sportif de faire de la musique…

Message reçu 5/5. Apple, première capitalisation boursière, se croit parfois tout permis. En 2011, Apple procède à un dépôt de marque pour son service de messagerie iMessage. Et dans le même temps, l’entreprise demande la déchéance des droits de la société Parabole Réunion. Cette dernière spécialisée dans la diffusion de chaînes de télévision par satellite a enregistré la marque I-Message quelques années auparavant. Les deux entreprises ont fait enregistrer leur marque dans des classes communes. Apple considère que l’utilisation de la marque par Parabole Réunion n’était pas suffisante. Apple s’appuie sur le poids économique de la société  pour juger si l’utilisation de la marque est suffisante ou non. C’est sûr que quand on est assis sur des centaines de milliards de dollars, une entreprise comme Parabole Réunion semble dérisoire… En plus de vouloir déposer une marque qui consiste à exproprier le langage courant, les arguments d’Apple laissent perplexes. 

Malpoli. Il y a des dérives qu’on affectionne particulièrement. Celle qui suit en fait partie. La société Citigroup spécialisée dans le secteur de la finance détient des droits sur la marque « THANKYOU ». Ce fait suffirait à rédiger une brève mais Citigroup va encore plus loin. Elle a décidé de porter plainte contre l’opérateur américain AT&T qui a organisé une campagne marketing à travers laquelle AT&T remercie ses clients pour leur fidélité. Et généralement, pour remercier quelqu’un on est souvent amené à employer le mot « merci ». Ça n’a pas loupé, Citigroup a porté plainte pour violation du droit des marques. Citigroup ose même dire que l’utilisation de thank you par AT&T risque de provoquer une confusion dans l’esprit des consommateurs !  Pour paraphraser Audiard, si on mettait les trolls en orbite, Citigroup n’aurait pas fini de tourner. 

thankyou

Patent Madness

Pisser dans un violon. Nous déclinons toute responsabilité quant aux risques psychologiques que peut provoquer la lecture de la dérive qui suit. On ne pensait pas que c’était possible mais c’est bien vrai : le gouvernement indien détient une douzaine de brevets liés à l’urine de vache ! Comme si cela ne suffisait pas, l’Inde s’apprête à étendre ses brevets à près de 150 pays. L’urine de vache serait utilisée dans le traitement contre certaines maladies et c’est ce qui justifie la volonté du gouvernement d’être aussi offensif. Bon d’accord, la vache est un animal sacré en Inde mais là c’est le couronnement de la folie ! 

Le Copyright Madness vous est offert par :

Lionel Maurel

Thomas Fourmeux

Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !

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