Dénoncée par de nombreuses associations environnementales, l’extension de la redevance copie privée aux produits d’occasion a pourtant été approuvée par le Sénat. Une décision absurde, à l’heure où les appareils reconditionnés permettent d’alléger notre empreinte carbone.

Elle est truffée d’incohérences, et pourtant la taxe copie privée sur les appareils reconditionnés a été adoptée par le Sénat le 2 novembre 2021. Jusqu’au bout, les entreprises du marché du reconditionné espéraient que les parlementaires feraient marche arrière sur cette proposition problématique, souligne Next Inpact. Cela n’a pas été le cas : dans le cadre d’une loi visant à alléger l’empreinte environnementale du numérique (ce qui est encore plus paradoxal), les sénateurs ont approuvé l’extension de la redevance copie privée (RCP) à tous les produits d’occasion, qu’ils soient reconditionnés ou non.

Les téléphones et tablettes d’occasion ayant un stockage de 64 Go ou plus seront donc soumis respectivement à une redevance de 10,08 euros TTC et de 10,92 euros TTC. Des sommes qui seront ensuite reversées à Copie France, l’organisme qui se charge de collecter les rémunérations versées par les fabricants ou importateurs de supports d’enregistrement (clés USB, téléphones portables, tablettes…) et de les redistribuer aux auteurs, artistes, éditeurs et producteurs.

Taxer doublement les produits d’occasion

Cette redevance copie privée sur les produits d’occasion est pourtant absconse. Pour commencer, la rémunération pour copie privée vise à compenser, auprès du milieu culturel, la capacité qu’a le public à pouvoir effectuer des enregistrements d’œuvres dans un cadre privé. Ce système concerne donc les appareils ayant une capacité d’enregistrement (clés USB, disques durs, etc.). Mais avec la prise de pouvoir des Spotify, Deezer et autre géants du streaming, cette pratique est déjà pas mal tombée en désuétude.

Appliquer la taxe copie privée à des produits d’occasion, c’est du reste faire le choix étrange de la leur appliquer deux fois, puisque la redevance a déjà été payée lors de l’achat neuf. Le point le plus dommageable dans l’histoire est cependant que cela risque d’entraver le développement du marché du reconditionné, qui permet pourtant de réduire l’empreinte carbone de la tech, en favorisant le réemploi des appareils, notamment des smartphones et des tablettes.

Des associations environnementales telles que Les Amis de La Terre étaient d’ailleurs vent debout contre ce projet. Le 21 octobre, l’ONG indiquait ainsi sur Twitter, sous le hashtag #sauvonsloccasion : « Ce matin nous étions devant le Sénat pour dénoncer les reculs du gouvernement français sur des mesures destinées à lutter contre l’obsolescence programmée et notamment l’introduction d’une redevance de 10€ sur les smartphones reconditionnés dans la Loi REN  ». Alors que la COP26 vient d’ouvrir ses portes pour accélérer la transition climatique, le Sénat fait preuve d’un très étrange sens des priorités.


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