Pour protester contre un projet de loi adopté en Turquie, qui renforcerait considérablement les pouvoirs de censure sans juge de l'administration sur Internet, le groupe de hackers RedHack s'est lancé dans une série de piratages.

Le groupe de hackers turc RedHack a lancé samedi une série d'actions de représailles numériques contre le projet de loi adopté jeudi dernier en Turquie, qui confie à l'administration de nouveaux pouvoirs de censure sur Internet, sans contrôle judiciaire.

Selon Reporters Sans Frontières, le projet de loi confie à la Haute instance des télécommunications (TIB) le droit d'ordonner aux FAI de bloquer tout site diffusant des contenus qui portent atteinte à la vie privée, qui sont "discriminatoires ou insultants à l’égard de certains membres de la société", ou qui vont contre les objectifs de protection de l'enfance et de la famille.

L'administration disposait déjà du pouvoir de faire fermer des sites affichant des contenus pédopornographiques (seul cas de censure sans juge prévu par la loi française), certaines "obscénités", ou des apologies au suicide. Mais alors que de nombreux sites sont déjà bloqués abusivement, ou ont dû se soumettre à la censure (à l'instar de YouTube), l'élargissement des pouvoirs de la TIB fait craindre une main-mise généralisée sur le web turque, au profit de la politique de l'APK, le parti au pouvoir de Recep Tayyip Erdo?an. Ce dernier est régulièrement accusé de vouloir instaurer la charia en Turquie.

Par ailleurs, le projet de loi réduirait à 24 heures le délai d'exécution des ordonnances de blocage, et prévoirait non plus seulement de bloquer des noms de domaine, mais aussi des adresses IP ou même des "mots clés". Ce qui fait peser le risque d'un filtrage par DPI, redoutable pour la vie privée.

Pour protester contre ces mesures indignes d'un pays démocratique, RedHack s'est attaqué d'abord aux opérateurs qui auront à appliquer les blocages. Il a ainsi diffusé quelques 5000 relevés de Vodafone montrant l'historique des messages vocaux des abonnés à Istanbul. D'autres données de TTNET et Turkcell auraient aussi été piratées, pour montrer que "aucun système n'est sécurisé à 100 %".

L'organisation anonyme s'en est aussi pris à divers sites institutionnels turcs. 

Par exemple, un site officiel de la province de Sakarya a été piraté pour informer les citoyens que l'essence était désormais gratuite, parce que "le gouvernement en vole assez aux gens" :

Les numéros de téléphone de prétendus "policiers meurtriers" ont été diffusés :

Le site de la ville de Kars (130 000 habitants) a été hacké :

Le site du ministère de l'éducation a été piraté pour accéder aux factures des écoles, par villes. "Il y a des dépenses astronomiques qui montrent clairement qu'il y a un degré de corruption, en particulier sur les factures d'eau", assure RedHack :

Outre les actions en ligne, les activistes turcs tentent aussi de faire entendre leur voix dans la rue, à travers des manifestations qui semblent toutefois peu suivies :

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