IMSI Catchers, géolocalisation, écoutes… Les différents outils d’abord réservés aux renseignements qui ont été ajoutés à l’armada de la surveillance françaises par la loi contre le crime organisé et le terrorisme (2016) sont désormais mis à disposition des centres pénitenciers.
Des espions en prison ?
Ce sont deux décrets datant de vendredi et signés par le premier ministre qui accordent désormais cette extension des techniques de renseignement aux prisons. Si les deux ajouts de l’exécutif ne viennent pas transformer le personnel pénitencier en espion de terrain, ils leur en donnent un certain nombre de prérogatives qui les en rapprochent. Les textes sont destinés à lutter contre le terrorisme dans nos centres pénitenciers, mais également à prévenir les projets d’évasion.
Les services pénitentiaires étaient déjà, depuis la loi de 2016, considérés comme pleinement intégrés au second cercle du renseignement français, une nuance essentielle pour comprendre aujourd’hui ces nouveaux décrets.
Le législateur considère désormais la prison comme un terrain du renseignement comme un autre, et plus inquiétant encore, les agents pénitentiaires comme d’éventuels rouages du renseignement. Une mutation du métier qui inquiète les fonctionnaires des centres et pose question sur les libertés des détenus.
La CGT Insertion et probation a déjà fait savoir ses critiques. Le collectif syndical s’alarme : « La mise en œuvre de ces nouvelles pratiques ne peut que rompre le lien de confiance avec les personnes prises en charge. [Les agents] vont se retrouver dans une insécurité professionnelle qui ne peut que les mettre en danger à terme. »
Parmi les nouveaux modus operandi de renseignement des prisons, on retrouve les fadettes — factures détaillées et enrichies de métadonnées — le balisage, la géolocalisation, les écoutes téléphoniques des téléphones fixes de la prison et enfin, les IMSI Catchers pour écouter et surveiller les téléphones introduits illégalement dans les centres. Par ailleurs, il existe également un dispositif pour surveiller et limiter — plus qu’il ne l’est déjà — l’accès à l’Internet des détenus.
Les décrets précisent les conditions que les agents doivent réunir pour obtenir le droit de surveiller les détenus. La chancellerie explique notamment que les écoutes téléphoniques ne sont acceptées que dans le cadre de la prévention de la lutte contre le terrorisme pour prévenir un passage à l’acte. La durée du dispositif ne peut excéder 48 heures.
Matignon précise également que les outils ont d’abord vocation à être utilisés pour lutter contre le terrorisme
Enfin, Matignon précise également que les outils ont d’abord vocation à être utilisés pour lutter contre le terrorisme plus que prévenir les évasions. Toutefois, en laissant un champ assez libre aux centres pénitenciers, les textes n’offrent que peu de garanties pour un usage modéré de ces techniques d’intrusion.
Assez curieux, on peut ainsi lire que les détenus sont avertis d’une utilisation éventuelle du renseignement en prison par une notification remise contre signature. Une notification qui constituera, on l’imagine, une preuve pour l’administration pénitentiaire que le détenu était bien informé de l’atteinte potentielle à sa vie privée et de la destruction de ses biens. En prison, vous signez pour perdre vos droits.
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