C’est sans doute la première fois qu’une entreprise aussi jeune risque d’importantes sanctions pour abus de position dominante par la Commission Européenne. Selon le Financial Times, Bruxelles pourrait communiquer « bientôt » ses griefs officiels contre le moteur de recherche dans le cadre d’une enquête antitrust, ouvrant ainsi la voie à des négociations ou de possibles sanctions. Le document serait attendu en avril, selon des rumeurs.

L’affaire promet de durer des années et d’être un feuilleton au moins aussi important que l’avait été celui des poursuites engagées contre Microsoft. Selon le Financial Times, une première décision de la Commission européenne concernant l’enquête pour abus de position dominante de Google pourrait être communiqué « bientôt ». Le juriste Cédric Manara précise sur Twitter que « selon la rumeur bruxelloise, on l’attend en avril« .

Selon toutes vraisemblances, la Commission devrait procéder à l’envoi d’une communication des griefs à Google, qui est une étape nécessaire avant le prononcé d’éventuelles sanctions pour abus de position dominante de Bruxelles. C’est par ce document que la Commission explicitera les accusations formulées à l’encontre de Google, et lui proposera d’y répondre dans un processus contradictoire. Les deux parties pourront alors éventuellement négocier un accord, ou Bruxelles pourra prononcer des sanctions s’il estime que les réponses de Google ne sont pas satisfaisantes. Ces sanctions peuvent aller de l’amende à l’obligation de procéder à certains ajustements.

Déjà en fin d’année dernière, le Financial Times avait évoqué la publication future d’un document de 400 pages de griefs contre Google.

L’enquête pour abus de position dominante, ouverte en septembre 2010, vise à déterminer si Google profite injustement de sa part de marché écrasante en Europe (plus de 90 % des recherches) pour imposer ses produits au détriment de ceux de la concurrence.

Au moins trois grandes catégories d’éventuels abus de position dominante concernent la firme de Mountain View.

Tout d’abord, Google est accusé de mettre en avant ses propres services lorsque des internautes recherchent des informations précises, en les mettant systématiquement en tête dans les résultats de recherche (par exemple pour les recherches géographiques, la météo, les horaires de cinéma, la comparaison de prix, les vidéos, etc.), même si les services concurrents sont meilleurs. Avec une part de marché aussi écrasante que celle de Google en Europe, l’ajout de tels services signe souvent la mort des entreprises qui n’ont pas la puissance de Google pour se mettre en avant, ou les met dans de graves difficultés. Sur ce point, la solution la plus souple pourrait être d’imposer à Google qu’il propose une sélection de services différents, parmi lesquels figureront les siens, comme il a été imposé à Microsoft le Ballot Screen qui l’oblige à proposer Internet Explorer parmi une sélection de navigateurs différents.

Ensuite, Google est soupçonné de modifier ses algorithmes de façon biaisée, non pas spécialement pour améliorer son service, mais pour pour déclasser des catégories de sites susceptibles de nuire à sa croissance (par exemple les comparateurs de prix qui grignotent sur les budgets AdWords, les sites de voyage,…). Sous prétexte d’améliorations, Google est capable du jour au lendemain de bouleverser la visibilité de sites internet qui n’ont souvent d’autre choix que de dépendre de leur classement dans les résultats de recherche (ce qui nous avait fait nous interroger sur le sens des responsabilités de Google). Là, la solution la plus radicale serait de couper Google en deux, entre ses activités d’éditeur de contenus, et ses activités de moteurs de recherche, pour écarter le risque de conflit d’intérêts. La solution avait été envisagée à l’époque du procès Microsoft, mais n’a jamais été ordonnée. Elle ne restera sans doute aussi qu’à l’état d’épouvantail contre Google, dont la croissance serait arrêtée nette par une telle décision, incompréhensible vue de Washington.

Enfin, la position dominante de Google lui offre le luxe de perdre de l’argent sur des services qui ne pourraient pas vivre de façon indépendante. Récemment, la justice française a donné raison à une entreprise qui avait porté plainte contre Google pour la gratuité de son service Google Maps. La justice avait condamné Google, non pas comme ça a été trop souvent interprété parce qu’il n’était pas admissible que le service soit gratuit, mais parce qu’il avait été démontré que Google créait cette gratuité artificielle pour écarter la concurrence en prévision du développement de services futurs, notamment dans la publicité locale.

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