Pour la famille d'Aaron Swartz, ça ne fait aucun doute. Le jeune homme aurait été poussé au suicide par la pression judiciaire dont il faisait l'objet après avoir piraté une base de données de publications universitaires, dans le but de les rendre accessibles au plus grand nombre. En quelques jours, Aaron Swartz semble en passe de devenir un martyr du combat pour la libération de l'accès aux oeuvres et au savoir.

Samedi, nous rapportions l'annonce douloureuse de la mort d'Aaron Swartz, l'un des activistes américains les plus talentueux, qui se battait pour favoriser la libre diffusion des savoirs et des oeuvres sur Internet. Agé de 26 ans, le jeune homme avait participé à la création du format RSS 1.0 alors qu'il n'avait alors que 14 ans, soutenu le lancement des licences libres Creative Commons qui ont permis une véritable explosion de la culture libre sur Internet, co-fondé le site de partage d'informations Reddit, ou encore créé le collectif Demand Progress, qui s'est vivement battu contre les projets de loi SOPA/PIPA, pour la légalité de Wikileaks ou encore pour l'abrogation du Patriot Act.

L'homme a été retrouvé par un ami, pendu dans son appartement de New York. Suicidé. Dans un communiqué, et alors que le jeune homme était dépressif depuis plusieurs années, sa famille a immédiatement dénoncé la pression judiciaire dont il faisait l'objet, qui aurait conduit Aaron Swartz à l'irréparable. Il était en effet poursuivi pour avoir téléchargé 4,8 millions d'articles issues de 1 000 publications universitaires et scientifiques hébergées dans la base de données JSTOR, qui étaient protégées par le droit d'auteur. Il risquait pour cela jusqu'à 35 ans de prison et 1 million de dollars de dédommagement.

"La mort d'Aaron n'est pas seulement une tragédie personnelle. Elle est le produit d'un système de justice pénale en proie à l'intimidation et à la disproportion des poursuites. Les décisions prises par des fonctionnaires dans le bureau du procureur du Massachussetts et par le MIT ont contribué à sa mort", assure la famille de l'activiste. 

#PDFTribute : l'hommage à Aaron Swartz par la liberté d'accès aux publications

Le MIT, la célèbre école de technologies américaine, qui avait porté plainte après le piratage de la base JSTOR en 2010, n'a pas écarté d'un revers de main sa responsabilité. Au contraire, dans une tentative d'apaisement alors que le site internet du MIT est attaqué par des Anonymous qui veulent rendre hommage à Swartz, son président Rafael Reif a fait savoir qu'il avait demandé une enquête interne sur les responsabilités du MIT. "J'ai demandé que cette analyse décrive les options que le MIT avait et les décisions que le MIT a prises, de façon à comprendre et à tirer des enseignements des actions entreprises par le MIT", écrit le président de l'institution dont nombre d'étudiants étaient admiratifs du parcours d'Aaron Swartz.

Pour télécharger les articles de la base JSTOR, qu'il n'a finalement jamais mis en ligne, Swartz avait écrit un script Python, et utilisé utilisé un compte du MIT dont il n'était pas membre. Il avait aussi utilisé de fausses adresses MAC pour contourner les mesures de blocage mises en place.

Alors que JSTOR avait abandonné les poursuites et même décidé il y a quelques jours de rendre gratuit l'accès à 1200 publications scientifiques autrefois réservées à ceux qui les achetaient, le MIT et la justice américaine avaient décidé de maintenir la procédure pénale. Au total, le bureau du procureur du Massachussetts a retenu 13 chefs d'accusation contre Aaron Swartz.

Souhaitant poursuivre l'oeuvre du défunt, qui a passé sa vie à tenter de libérer l'accès aux oeuvres et au savoir, sans chercher à en tirer de bénéfice personnel, le développeur Patrick Socha a lancé le site Internet PDFTribute.net, sur une idée suggérée sur Reddit par le chercheur Micah Allen, et relayée par des amis d'Aardon Swartz. Le site référence déjà plus de 1500 fichiers PDF de travaux de recherche, mis ainsi à la disposition des internautes à travers le hashtag #PDFTribute sur Twitter. Souvent, ces travaux sont diffusés par les chercheurs eux-mêmes.


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