La dernière sortie d'Aurélie Filippetti sur Hadopi est très mal passée. Quelques heures après son commentaire sur le premier condamné dans le cadre de la riposte graduée, la Haute Autorité, la Sacem et le SNEP ont tous critiqué, avec plus ou moins de réserve, son attitude.

Le bras de fer médiatique entre Aurélie Filippetti d'une part et la Hadopi et les ayants droit d'autre part se durcit. Et les dernières flèches décochées par la ministre de la culture ont passablement agacé la Haute Autorité, qui s'est fendue d'un communiqué envoyé par mail pour défendre son action dans le champ de l'offre légale mais qu'elle "ne peut être jugée qu'au regard des outils par la loi".

La Hadopi rejette la faute sur le législateur

Problème, le législateur n'a pas été d'une grande souplesse lors de l'élaboration de la loi qui a donné naissance à l'autorité administrative indépendante. Résultat, ces outils "sont particulièrement rigides et limités". Dans ces conditions, la Hadopi ne peut pas aller bien loin et, surtout, ce n'est pas à elle qu'il faut s'en prendre. La Hadopi "n'en porte aucunement la responsabilité et ne peut en être rendue comptable".

Cela signifie-t-il que la Hadopi n'a rien fait dans ce domaine ? La Haute Autorité refuse de laisser cette impression. Elle rappelle l'existence du label PUR qui récompense les services respectant le droit d'auteur. Selon le compteur du portail, il y a aujourd'hui 62 plates-formes qui ont décroché le label. "Ce résultat est le fruit d'un travail considérable", affirme le communiqué.

De plus, "l'institution n’a pas ménagé ses efforts dans la médiation entre les ayants droit et les plateformes de diffusion, permettant de résoudre un certain nombre de difficultés qui faisaient obstacle au développement des offres musicales en ligne", et a assuré le suivi des treize engagements pour la musique en ligne, pris avec l'aval des maisons de disques.

La Sacem et le SNEP défendent Hadopi

La Hadopi a par ailleurs reçu un soutien de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) et du Syndicat national de l'édition phonographique (SNEP). L'AFP a en effet recueilli les réactions de Jean-Noël Tronc, directeur général de la Sacem, et de David El Sayegh, patron du SNEP. Tous deux sont très remontés contre la sortie de la ministre.

"J'ai lu avec stupeur les propos prêtés à la ministre de la culture. Personne n'a le droit d'ignorer qu'on dispose de plus de 14 millions de morceaux de musique en écoute légale sur Internet que ce soit par téléchargement ou en écoute gratuite. Quand on parle de ces sujets, parlons de la réalité. On n'est plus en 2005 !", a déclaré le premier, en référence au développement de l'offre légale dans la musique ces dernières années.

De son côté, le second voit dans cette condamnation "la preuve que le système fonctionne et qu'on a une sanction proportionnée. S'il n'y avait pas eu Hadopi, cette personne risquait la correctionnelle" pour des faits de contrefaçon. Ce qui est inexact. Hadopi complète l'action pénale, elle ne la remplace pas. Les ayants droit peuvent toujours lancer une action en justice de leur côté, en marge de la riposte graduée.

David El Sayegh ajoute que vu la sanction financière prononcée par le juge, 150 euros, "il aurait pu s'abonner à Deezer ou Spotify et bénéficier de 10 millions de titres pendant deux ans". Formidable. Sauf que ce n'est pas lui qui a téléchargé les deux titres cités dans cette affaire. Un point qui a visiblement échappé au directeur général du SNEP.

"L'offre légale existe. Ce n'est pas à l'Hadopi de la créer, son rôle c'est de créer une régulation pour qu'elle puisse se développer et c'est ce qu'elle fait", a-t-il conclu.

La balle est désormais dans le camp d'Aurélie Filippetti.

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