Régulièrement nous vous proposerons d’étudier l’impact des média sur les échanges de fichiers par P2P, en particulier grâce aux statistiques fournies par notre partenaire Razorback. Cette semaine : Comment Internet pourrait rapidement bouleverser la télévision.

Nous racontions récemment les déboires des producteurs de Global Frequency. Les droits du pilote de la série ont été achetés par Warner Bros, mais la chaîne de télévision du groupe a refusé de programmer la série sur les écrans. Quelques jours plus tard, le premier épisode de Global Frequency était largement diffusé sur BitTorrent, et les internautes sont rapidement venus peupler les sites des producteurs pour réclamer la suite.

Une nouvelle fois, le Peer-to-Peer montrait sa capacité à supplanter les canaux de diffusion classiques. Mais surtout, le P2P a l’avantage de permettre au public d’avoir la maîtrise de ce qu’il « consomme », et autorise les diffuseurs à promouvoir de nouveaux contenus sans prendre de risques importants.

Pourquoi peut-on parler de diffusion démocratique ?

Pendant tout le siècle dernier, seules les ondes hertziennes (ou presque) permettaient de diffuser des programmes. Ces ondes étant limitées en nombre, il s’agit de biens publics que l’Etat se doit d’administer avec soin. Puisqu’il n’y a qu’un nombre limité de fréquences attribuables, les entreprises qui désirent exploiter ces ondes pour diffuser des programmes doivent justifier de l’intérêt public de leurs projets, et elles sont choisies sur dossier (c’est d’ailleurs la principale raison officielle de l’existence du CSA).

Une fois que ces entreprises de communication se voient attribuer une licence, elles sont elles-mêmes très limitées. Elles ne peuvent en effet diffuser qu’un seul programme à la fois sur chaque fréquence. C’est pour cela que Warner Bros refuse de diffuser Global Frequency. Il lui faut optimiser un maximum la grille des programmes et ne prendre aucun risque face à ses annonceurs. Si le risque est trop important, la chaîne préfèrera laisser la série de côté et diffuser autre chose, dont l’audience sera peut-être moins importante mais sera relativement garantie.

Avec Internet et l’Ethernet, il n’y a plus de rareté des ressources de diffusion. Il y a théoriquement un nombre illimité de « fréquences », et chacun peut donc diffuser ce qu’il souhaite sans être sélectionné préalablement sur dossier. Toutes les « chaînes » (en fait des sites internet) peuvent diffuser autant de programmes qu’elles le souhaitent. La notion même de « grille des programmes » disparaît d’ailleurs, au profit de l’idée d’un « catalogue de programmes » proposés à la demande.

Grâce à cette évolution majeure dans les modes de diffusion, il n’y a plus aucun risque à diffuser un pilote de série TV sur Internet, puisque l’éventuel insuccès du pilote n’aura aucun effet sur l’audience globale de la « chaîne ». Ceux qui ne demandent pas à voir Global Frequency pourront demander à voir autre chose.

Naturellement, Internet permet ainsi de proposer un éventail bien plus important de contenus et de répondre aux demandes et aux intérêts de chacun.

Les réseaux P2P font déjà office de kiosque à la demande

Selon les données dont nous disposons, la série Lost ferait partie des tous premiers contenus les plus demandés actuellement sur le réseau eDonkey. Le passage de la série sur TF1 le 25 juin dernier a littéralement fait exploser le succès de sa version HDTV (capturée sur une chaîne numérique haute-définition). Les internautes se servant du réseau comme d’un kiosque, ils ne se fixent plus comme impératif de rester devant leur téléviseur le samedi soir pour regarder le dernier épisode de la série. Ce qu’ils ratent, ils peuvent le télécharger le lendemain, avec une qualité numérique parfaite, et sans subir de coupures de publicités.

Pour ce service à qualité unique, il n’existe aujourd’hui aucune alternative légale payante qui rétribuerait les producteurs de la série. Pourtant l’on voit bien d’après ce graphique tiré des statistiques ed2k history que la demande existe :


(Toutes les heures, environ 1000 personnes téléchargent le pilote de Lost)

Loin d’être l’ennemi des producteurs de contenus, qui seront toujours demandés, le P2P est davantage un danger pour les distributeurs et les diffuseurs qui perdent tout contrôle monopolistique.

Puisque ce sont eux qui aujourd’hui font vivre les producteurs, il faut là aussi renouveler entièrement le modèle économique qui fait fonctionner Hollywood.

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