Dans une interview à paraître vendredi, accordée à Edition Multimédia, Eric Walter souffle le chaud et le froid sur la manière de lutter contre le piratage sur Internet. Hostile à la régulation par la technique, il se dit en revanche favorable à une régulation de tous les acteurs, et défend deux voies ouvertes par l'Hadopi, qui semblent pourtant s'opposer dans leur philosophie et leurs effets. Dur à suivre.

Dans une interview accordée à Edition Multimédia, qui paraîtra ce vendredi 13 décembre, le secrétaire général de l'Hadopi Eric Walter défend sa doctrine en matière de régulation du piratage et, plus largement de l'offre culturelle. En résumé, Eric Walter s'oppose à toute action qui viendrait heurter la neutralité technique des réseaux, mais plaide pour une régulation des acteurs qui se servent de ce réseau. Quitte, parfois, à paraître incohérent.

"L’Hadopi ne « régule » pas Internet et je ne crois d’ailleurs pas à une régulation d’Internet", assure-t-il. "Je pense que c’est à la fois illusoire, inutile et dangereux. Internet, au sens réseau et non les contenus, a ceci de très particulier qu’il est « régulé » par les protocoles qu’il utilise pour son fonctionnement". C'est le fameux Code Is Law de Lawrence Lessig.

En revanche, poursuit-il, "l'action publique doit s’orienter, d’une part, vers les acteurs qui utilisent Internet pour leurs activités et, d’autre part, vers les utilisateurs". Une doctrine qui n'est pas fondamentalement opposée à celle qui veut confier au CSA le pouvoir de réguler les acteurs qui diffusent des contenus sur Internet, et qui conserve la riposte graduée pour "éduquer" les internautes.

Des pistes contradictoires

A cet égard, alors que l'Hadopi s'est montrée hostile au filtrage, Eric Walter estime que la décision récente d'un tribunal d'ordonner aux FAI le blocage de sites de streaming est "une décision pour l'avenir", ce qui brouille la lisibilité du message. "Elle est bien plus importante pour la jurisprudence qu’elle crée que pour la fermeture de sites de streaming – dont il n’a échappé à personne qu’ils avaient déjà majoritairement fermés", note-t-il. Cependant, Eric Walter semble douter de l'efficacité de telles mesures. "La question fondamentale sous-jacente est celle de l’efficience des moyens déployés au regard des objectifs poursuivis".

Eric Walter réalise à ce sujet un grand écart curieux, en jugeant dans un même élan que deux pistes en apparence contradictoires ouvertes par l'Hadopi "représentent un investissement considérable et sont, à mon sens, des perspectives d’avenir très concrètes".
 
Il s'agit d'un côté de l'étude sur les moyens de lutter contre la "contrefaçon commerciale", dans laquelle Mireille Imbert-Quaretta (présidente de la Commission de protection des droits de l'Hadopi) défend une forme de riposte graduée contre les hébergeurs et intermédiaires financiers, lorsqu'ils permettent à des services en ligne de gagner de l'argent grâce au piratage (sites de streaming, de téléchargement direct, d'indexation de liens BitTorrent, etc.). A cet égard, un rapport sur les méthodes précises à mettre en oeuvre doit être rendu public au début de l'année prochaine, et pourrait être traduit dans la loi Création présentée en février 2014.
 
De l'autre côté, il s'agit de la proposition de légalisation du partage non marchand, par une "rémunération proportionnelle du partage" qui viserait à faire payer, pour des échanges enfin légalisés, les intermédiaires que la première piste viendrait condamner. Comment concilier ces deux pistes sans en tuer une ? Et si l'une des deux doit mourir, il y a fort à craindre que ça soit cette dernière.
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