Le Parti Socialiste a déposé mardi au Conseil constitutionnel son recours contre la loi Loppsi, mais le texte de la saisine est loin de faire l’unanimité. Nous avions ainsi pointé du doigt l’absence de toute mention de l’article 2, qui pénalise le simple fait de « troubler la tranquillité » d’autrui sur Internet, en usant de « données de toute nature » permettant de l’identifier (y compris donc son nom, sa photographie, son pseudonyme…). La disposition risque de porter atteinte à la liberté d’expression, qui est en principe protégée par le Conseil constitutionnel. Sauf à ce que les sages décident de s’en auto-saisir, ce qui est rare, la disposition restera intacte.
Le Parti Pirate, qui avait développé un long argumentaire juridique dans un texte de recours au Conseil constitutionnel publié sous licence libre, s’est ainsi énervé mercredi des manques de la saisine envoyée par le Parti Socialiste. « Nous avons constaté avec gravité que cette dernière était incomplète« , écrit le PP, qui s’adresse directement au principal parti d’opposition :
Votre recours n’aborde pas non plus l’absence d’encadrement clair pour la transposition du principe des écoutes téléphoniques aux fichiers et données numériques instauré par l’article 23, qui en l’état porte atteinte de manière disproportionnée à la vie privée des citoyens.
Par ailleurs, il y a de votre part une légereté blâmable dans la mesure où votre texte de saisine sur l’article 4 n’a pas pris en compte toutes les indications, mesures et recommandations, non seulement de notre part mais également d’autres contributeurs ; et ce alors que cet article va donner à un ministre de l’Intérieur condamné pour atteinte à la présomption d’innocence les pleins pouvoirs de censure du Web, sans contrôle de l’autorité judiciaire (…)
Si nous pourrions comprendre que vous rejetiez des contributions ne portant pas sur le bloc de Constitutionnalité, il est grave que vous étouffiez ainsi des articles qui présentent un doute sérieux.
Doit-on vous rappeler que le but d’une telle saisine est de demander au Conseil de se prononcer sur la constitutionnalité de la loi ? Il est donc de votre devoir de lui signaler toute partie de celle-ci présentant une suspicion d’inconstitutionnalité.
Le Parti Pirate demande donc au Parti Socialiste d’amender son recours pour le compléter sur les articles qui posent question, ou de dire « publiquement en quoi les éléments que vous n’avez pas repris de notre texte, et notamment concernant les articles 2 et 23, sont selon vous conformes à la Constitution« .
Souhaitant peser sur les élections de 2012 auprès d’internautes qui sont souvent leaders d’opinion, le PP estime qu’à défaut, le PS protègerait « les textes de l’UMP qui vous arrangent, au détriment de valeurs fondamentales« .
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