Un séisme de forte intensité a touché l’île de Taïwan le 3 avril 2024. Le bilan, encore provisoire, évoque une dizaine de morts et des centaines de blessés. Les dégâts semblent toutefois relativement contenus. Un constat qui s’explique par la situation géographique particulière du pays.

9 morts, 882 blessés et 77 personnes coincées dans des décombres. Voilà le point de situation qu’a dressé la NFA (National Fire Agency), une agence rattachée au ministère de l’Intérieur taïwanais, à la suite du séisme qui a atteint l’île le 3 avril 2024. Un bilan provisoire, donc, qui pourrait augmenter dans les heures et les jours à venir.

Ces premiers éléments chiffrés contrastent avec l’intensité du tremblement de terre qui a secoué Taïwan. La magnitude de la secousse est évaluée à au moins 7 — l’Institut d’études géologiques des États-Unis (USGS) affiche une mesure de 7,4 à 18 km au sud / sud-ouest de la ville côtière de Hualien. Une réplique de magnitude 6,5 a été détectée ensuite.

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La situation à Taïwan. // Source : USGS

Un séisme dévastateur en 1999

S’il n’est pas encore définitif, ce premier décompte des victimes tranche avec le séisme que les Taïwanais et les Taïwanaises ont connu en 1999. Avec un épicentre situé au niveau du centre de l’île, le tremblement de terre de Chichi (magnitude 7,7) avait entraîné la mort de 2 415 personnes et endommagé ou détruit des dizaines de milliers de bâtiments.

Les statistiques qui émergent de la secousse survenue le 3 avril à l’autre bout du monde sont aussi très loin du bilan terrible qu’a connu le Maroc en 2023, à Al Haouz, malgré une magnitude moindre, évaluée à 6,9. Le pays a perdu presque 3 000 personnes lors de cet épisode, et l’intensité du choc a détruit massivement maisons comme immeubles.

Géographiquement parlant, Taïwan se trouve non loin d’une zone de contact entre deux plaques tectoniques — l’eurasienne et la philippine. « À l’endroit du séisme, la plaque philippine « se déplace vers le nord-ouest par rapport à la plaque eurasienne à une vitesse d’environ 78 mm/an », relève l’USGS, qui qualifie la région de « tectoniquement complexe. »

Hualien
La ville de Hualien, en octobre 1999. // Source : Mfpan9389115

Toute la région borde d’ailleurs une zone dénommée la ceinture de feu du Pacifique, où l’on retrouve de nombreux volcans actifs, mais aussi les limites de diverses plaques tectoniques. Le Japon, par exemple, est au carrefour de quatre plaques (eurasienne, philippine, pacifique et nord-américaine). D’autres longent des pays comme l’Indonésie et la nouvelle-Zélande.

De fait, « de nombreux autres grands tremblements de terre de magnitude 7+ » sont observés dans la région, note l’USGS. Ces cinquante dernières années, six séismes ont dépassé la magnitude 7 dans un rayon de 250 km autour du tremblement de terre du 3 avril, dont celui de Chichi, qui a été le fort d’entre eux.

Le séisme de Chichi s’était produit à 59 km de l’actuel et avait occasionné des dégâts estimés à 14 milliards de dollars. Plus loin dans le temps, en 1920, un séisme de magnitude 8,2 avait déjà été relevé dans les environs très proches de ce tremblement de terre. Là encore, le mouvement et le contact des plaques sont en cause.

Reste que le bilan de la secousse du 3 avril est relativement bas au regard de son intensité, en comparaison de la catastrophe de 1999 ou du bilan terrible que peuvent enregistrer d’autres régions du monde tout aussi exposées. Les dégâts sur les constructions semblent également plutôt contenus — 125 bâtiments endommagés ont été signalés.

Mesures anti-sismiques à Taïwan

Plusieurs éléments de réponse peuvent expliquer ce bilan.

Là où le séisme s’est déclenché, on relève une faible densité de population dans la zone. Il a eu lieu le long de la côte est de l’île, dans une région bien moins peuplée que la façade ouest du pays. La plus grande ville, Hualien, qui compte 100 000 habitants, se trouvait à une vingtaine de kilomètres de distance.

Le pays bénéficie aussi, compte tenu de ses problématiques géographiques, de normes anti-sismiques particulièrement strictes par rapport au reste du monde. C’est ce que relève Antoine Bondaz, chargé de recherche auprès de la Fondation pour la recherche stratégique, dans un commentaire publié sur X (ex-Twitter) le 3 avril.

« Le séisme à Taïwan rappelle surtout la préparation et la résilience de l’île à ce type de catastrophes naturelles. Dans d’autres pays, le bilan humain et infrastructurel aurait été bien bien plus lourd », écrit ce spécialiste de l’Asie de l’Est, et plus particulièrement de Taïwan. En fait, Taïwan est comparable au Japon en matière de règles anti-sismiques.

En 2018, cité par le Los Angeles Times, Lai Ching-te, l’actuel président de Taïwan, affirmait, alors qu’il était premier ministre, que plus de 99 % des structures publiques sont sûres. De nouvelles normes ont effectivement été établies après 1999 — même si la presse locale pointe encore des trous dans la raquette.

Des vidéos spectaculaires circulent d’ailleurs sur les réseaux sociaux, qui montrent les effets des secousses dans les bâtiments, notamment. Des balancements impressionnants, mais prévus : les constructions parasismiques absorbent le choc en contrebalançant ses effets avec une certaine souplesse — on l’avait vu en 2011 au Japon :

Ces normes, quand elles sont respectées et appliquées, réduisent le risque d’un effondrement et, par conséquent, celui d’occasionner des victimes. Cela ne fournit toutefois pas toujours une protection absolue. En 2018, Hualien avait connu un séisme de magnitude 6,4. Dix-sept personnes avaient perdu la vie durant la catastrophe.

Taïwan a une difficulté : l’ancienneté de son parc immobilier. Si les bâtiments neufs satisfont les normes anti-sismiques sans difficulté majeure, il y a des immeubles et des maisons qui ont des décennies d’ancienneté et qui ne peuvent pas bénéficier facilement d’une rénovation. Il y aurait 4,6 millions d’habitations résidentielles ayant plus de 30 ans.

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