Au détour d’un texte où sexisme et homophobie deviennent des armes malheureuses de la lutte contre les violences faites aux femmes, le député Jacques Bompard propose que le ministère de l’Intérieur bloque les sites pornographiques.

Impossible, a priori, d’avoir l’esprit malveillant quand on tombe sur une proposition de loi relative à la lutte contre toutes les violences faites aux femmes. Et pourtant, il suffit de quelques lignes de plus pour débusquer le piège, précisément à la lecture du prénom et du nom du député qui présente cette proposition : Jacques Bompard, membre fondateur du Front National ayant depuis successivement rejoint le Mouvement pour la France de Philippe de Villiers et créé la Ligue du Sud avec le Bloc Identitaire, le parti de France et le MNR. Avec un tel parcours, on commence à se faire une petite idée de la suite du texte.

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Le maire d’Orange à la Manif pour tous

Et Bompard ne déçoit pas. En bon député à la droite de l’extrême droite, il fustige tour à tour la femme active (« une société qui leur refuse la possibilité d’élever elles-mêmes leurs enfants, en diminuant les allocations familiales et en promouvant le modèle exclusif de la femme active »), le droit à l’avortement (« l’incitation à la pratique de l’avortement est également une violence éthique ») ou encore, la différence entre le genre et le sexe (« C’est au nom de ce droit à la différence que nous refusons la théorie du genre, car nous estimons qu’elle blesse les hommes autant que les femmes dans leur nature profonde ») entre autres saillies contre le mariage pour tous.

C’est dans cet amalgame entre des sentences d’un sexisme moyenâgeux, un discours anti-avortement et des propositions homophobes, le tout au nom de la lutte légitime contre les violences faites aux femmes, qu’à l’article 17, Bompard propose que le ministère de l’Intérieur puisse bloquer les sites pornographiques :

« En outre, le ministre de l’intérieur est habilité à interdire la diffusion de revues à caractère pornographique quel qu’en soit le public, et à fermer l’accès aux sites internet pornographiques, à faire poursuivre les hébergeurs et diffuseurs de tels sites ou revues. »

Si le texte ne précise pas les conditions d’application d’une telle disposition, on imagine très bien qu’il s’agit d’une proposition de blocage administratif qui n’aurait pas besoin d’un jugement pour être effectif. Et le maire d’Orange ne fait pas dans la demi-mesure : il propose que tous les sites pornographiques soient bloqués — sans prendre le risque, bien entendu, de définir la pornographie. Ce serait au bienveillant ministère d’en décider et à ses services de mettre en place le blocage.

Sacrifier une fois de plus l’action de la justice sur l’autel de l’arbitraire

Comme souvent, ces décisions arbitraires sont  les chemins les plus courts — et non les plus efficaces — pour éviter de chercher les véritables causes des problèmes soulevés. La pornographie est un phénomène contemporain dont on ne peut balayer d’un revers de la main les enjeux, souvent tristes et complexes comme l’a très bien montré le documentaire Hot Girls Wanted. Le tout, en sacrifiant une fois de plus l’action de la justice sur l’autel de l’arbitraire.

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