C’était la seule proposition du rapport Zelnik qui visait vraiment l’amélioration de l’offre légale en ligne, et elle est déjà en passe d’être abandonnée. Bien que soutenue par Nicolas Sarkozy, la licence de gestion collective que proposait la mission mise en place par Frédéric Mitterrand ne sera très certainement pas traduite ni en accord sectoriel, ni en loi.

Aymeric Pichevin, qui modérait la semaine dernière au Midem à Cannes une table ronde sur le rôle du politique pour favoriser la diffusion des contenus sur Internet, rapporte sur son blog ce qui ressemble fort à un abandon de la mesure phare du rapport Zelnik. Lors de cette table ronde, Patrick Zelnik aurait en effet laissé « entendre que si le marché numérique décollait cette année en France, la gestion collective obligatoire ne serait pas nécessairement instaurée« .

Il s’agit d’une impressionnante reculade par rapport aux préconisations du rapport, qui allait jusqu’à menacer d’intervenir par la loi dès la fin de l’année si aucun accord n’était trouvé. On pouvait en effet y lire en page 5 que « la mission appelle l’ensemble des professionnels concernés (producteurs, artistes-interprètes) à se réunir et à opter dans les meilleurs délais pour un régime de gestion collective sous une forme volontaire. Si d’ici à la fin de l’année 2010, ces professionnels n’étaient pas parvenus à un tel accord, la mission propose que les pouvoirs publics instaurent à cette date, par la loi, un régime de gestion collective obligatoire des droits exclusifs par les sociétés agréées de perception et de répartition des droits des producteurs et des artistes-interprètes« .

Le président Nicolas Sarkozy lui-même avait surpris en reprenant la proposition à son compte, et en brandissant lui aussi la menace d’une intervention législative si aucun accord n’était négocié sur une base volontaire. Il s’agit pour les maisons de disques de donner l’accès à l’ensemble de leurs catalogues à toutes les plateformes candidates à leur exploitation dans des termes identiques, à l’image de ce qui est pratiqué par exemple pour les radios hertziennes. De sorte, il n’y aurait plus de droit d’accès au catalogue à payer d’avance et donc plus véritablemen de barrière à l’entrée pour les jeunes pousses.

Mais la proposition préférée à la taxation des FAI a très vite dégénéré en pugilat dans le petit monde en hypoxie de l’industrie musicale, les représentants des majors se levant comme un seul homme pour dénoncer le confratricide. Ce qui devait être la seule vraie réforme promise par le rapport Zelnik est donc déjà abandonné, d’autant que le marché musical a déjà donné des signes de reprise avant-même la mise en œuvre de l’Hadopi. « D’où l’ambiance un peu surréaliste qui règne depuis l’officialisation de ce rapport, et en particulier au Midem, où les producteurs ont affiché une opposition ferme à cette proposition, sans toutefois sembler trop inquiets« , raconte Aymeric Pichevin.

Nicolas Sarkozy aura-t-il le courage de dire qu’il ira « jusqu’au bout », comme il l’avait fait de la riposte graduée ? Rien n’est moins sûr.


Si vous avez aimé cet article, vous aimerez les suivants : ne les manquez pas en vous abonnant à Numerama sur Google News.