Selon un rapport d’Interpol, publié fin juin 2025, les « scam centers » auraient jeté leur dévolu sur l’Afrique de l’Ouest. À la croisée de la cybercriminalité et de la traite d’êtres humains, ces réseaux, venus majoritairement d’Asie du Sud-Est, s’installent de plus en plus dans la région.

Recrutés sous de faux prétextes, puis contraints à commettre des fraudes numériques à grande échelle : le phénomène des « scam centers » s’étend en Afrique de l’Ouest.

C’est ce que dévoile un rapport d’Interpol, rendu public le 30 juin 2025 sur leur site officiel. D’après les données publiées, l’épicentre du fléau reste en Asie du Sud-Est, où des « scam compounds », opérés par des réseaux criminels organisés, sont installés depuis de nombreuses années dans des hôtels, des casinos ou des zones aménagées.

Ces structures génèreraient, selon les Nations Unies, jusqu’à 40 milliards de dollars de profits illicites chaque année, grâce à des fraudes de type « pig-butchering » : des arnaques à l’investissement, des escroqueries sentimentales et des fraudes à la cryptomonnaie.

Mais voilà, face à la pression croissante des autorités asiatiques, ces réseaux cherchent à s’implanter dans de nouvelles régions moins surveillées, et l’Afrique de l’Ouest présente toutes les conditions favorables : infrastructures faibles, corruption, et manque de coopération internationale.

L'Afrique de l'Ouest, mais également l'Amérique Centrale, l'Afrique australe et une partie de l'Europe de l'Est font partie des potentiels hubs en devenir du trafic d'êtres humains  // Source : Interpol
L’Afrique de l’Ouest, mais également l’Amérique Centrale, l’Afrique australe et une partie de l’Europe de l’Est figurent parmi les régions identifiées comme de potentiels nouveaux hubs pour les « scam centers » alimentés par la traite d’êtres humains. // Source : Interpol

Un modèle criminel mondialisé

Le schéma est redoutable et parfaitement huilé. Tout commence par de fausses offres d’emploi qui attirent en nombre les potentielles victimes, dans une région où le chômage des jeunes est un problème lancinant.

Une fois recrutés, les individus deviennent victimes et coupables : séquestrés dans des complexes où ils sont forcés, sous la menace, à réaliser diverses arnaques en ligne ou du blanchiment d’argent.

Si tous les membres de ces « scam centers » ne sont pas nécessairement recrutés de force, Interpol révèle que ceux qui refusent des missions sont parfois soumis à des violences physiques, des menaces, voire à la torture ou à des abus sexuels.

Les réseaux criminels s’appuient également sur des facilitateurs locaux et les routes utilisées pour cette traite humaine sont les mêmes que pour d’autres trafics qui gangrènent la région (drogue, armes, espèces protégées).

Une région face au défi de la coopération

Dans ses recommandations, Interpol souligne l’importance de la collaboration entre les différents pays touchés par le phénomène. L’organisation est la seule à pouvoir coordonner des actions de démantèlement dans plusieurs pays.

En décembre 2024, une vaste opération des autorités nigérianes a tout de même permis l’arrestation de près de 800 personnes, dont 193 étrangers, à Lagos. Tous impliqués dans la formation et le recrutement de jeunes Nigérians pour des escroqueries en ligne.

Une des témoins appelés à témoigner lors du procès, qui s’est tenu en juin 2025, a expliqué comment elle avait été contactée via WhatsApp, puis rapidement embauchée et logée. Payée 250 000 nairas par mois, soit 160 dollars (un salaire supérieur à la moyenne à Lagos), elle avait tenté de démissionner, mais en avait été empêchée. « Nous étions toujours escortés par des agents de sécurité du bureau jusqu’au logement et nous n’étions jamais autorisés à quitter les locaux de l’entreprise. Avant de commencer à travailler chaque jour, nous devions remettre nos téléphones. », a-t-elle confié à la barre.

Neuf citoyens chinois ont été condamnés à un an de prison pour leur rôle dans ce réseau.

L’automatisation du trafic grâce à l’IA

L’essor intercontinental des « scam centers » a également été permis par l’automatisation croissante des fraudes grâce à l’intelligence artificielle. Les réseaux criminels exploitent les outils d’IA générative pour industrialiser leurs arnaques, tant sur le volet des arnaques en ligne que dans le trafic d’être humain.

Ainsi, les IA sont utilisées par ces groupes pour générer des offres d’emplois crédibles et plus facilement attirer leurs proies.

Puis, dans un second temps, elles accélèrent la création de faux profils sur les réseaux sociaux, la rédaction automatisée de messages de phishing, ou encore la génération de deepfakes pour tromper les victimes lors d’appels vidéos ou vocaux.

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