L’Hadopi n’est plus. Ses deux organes, le collège et la Commission de protection des droits (CPD), n’ont plus le nombre de membres imposé par la loi, depuis la fin de certains mandats au soir du 23 décembre 2011. Le décret qui devait nommer de nouvelles personnalités n’a pas été publié.

C’est une situation incongrue, qui visiblement embarrasse le gouvernement. Depuis le 24 décembre 2011, l’Hadopi n’a plus d’existence juridique ; ou cette dernière est en tout cas entachée d’irrégularité. En effet, alors que la loi prévoit que le collège de l’Hadopi est composé de neuf membres, parmi lesquels figure le président (en l’espèce la présidente) de l’autorité administrative, trois des membres n’ont plus de mandat depuis la veille de Noël. Et ils n’ont pas été remplacés.

C’est par un décret du 23 décembre 2009 que les neuf membres du collège de la Haute Autorité avaient été désignés. Par principe, la loi prévoit que ces membres sont nommés pour six ans. Mais pour permettre une rotation régulière, le gouvernement a prévu par décret que l’Hadopi procède avec effet rétroactif « au tirage au sort des trois membres dont la durée du mandat sera de deux ans et des trois membres dont la durée du mandat sera de quatre ans« . C’est par une délibération du 8 janvier 2010 (.pdf) que l’Hadopi a procédé à ce tirage au sort, et ainsi constaté les noms des trois membres dont le mandat n’était que deux ans, et s’arrêtait donc au soir du 23 décembre 2011 :

  1. Christine Mauguë, nommée par le CSPLA ;
  2. Patrick Bouquet, nommé par la Cour des comptes ;
  3. Michel Thiollière, nommé par le président du Sénat.

Ces trois membres n’ont plus de mandats, et n’ont pas été remplacés. L’Hadopi, dont la loi dit qu’elle est « composée d’un collège et d’une commission de protection des droits« , est donc amputée de son premier organe, qui n’a plus d’existence juridique. S’il n’a plus ses neuf membres, imposés par l’article L331-16 du code de la propriété intellectuelle, le collège de l’Hadopi ne peut plus fonctionner. Pire, « le président du collège est le président de la Haute Autorité« . Cela veut-il dire que l’Hadopi n’a plus de présidence ?

Interrogé la semaine dernière, le ministère de la Culture nous a répondu que « la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet étant une autorité publique indépendante du ministère de la Culture et de la Communication« , c’est auprès d’elle qu’il fallait nous renseigner. Or les nominations des membres du collège de l’Hadopi, réalisées par décret, sont de la responsabilité du pouvoir réglementaire (donc du gouvernement), et non de l’autorité administrative. Relancé sur ce point, le ministère de la Culture ne nous a plus répondu. Quant à l’Hadopi, nous n’avons pas réussi à la joindre.

En revanche, son site internet a été modifié. Les trois membres échus du collège de l’Hadopi ne figurent plus sur la page du site officiel consacrée aux membres du collège.

Pire. Même le bras armé de l’Hadopi, la Commission de protection des droits, n’a plus d’existence juridique. L’article L331-17 du code du CPI dit que la CPD est composée de trois membres, qui ont eux-aussi été désignés le 23 décembre 2009. Parmi eux figurait Jacques Bille, dont le mandat de deux ans a échu. Il n’est plus sur le site officiel.

Or tant qu’il ne sera pas remplacé, la CPD ne pourra plus se réunir, et ne pourra donc plus envoyer de recommandés ou transmettre des dossiers aux juges.

Gageons que l’Hadopi et le gouvernement sauront rétablir la situation. Mais dans l’attente, l’Hadopi n’est plus.


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