Chaque samedi, c’est la compilation de l’actualité de la propriété intellectuelle et de ses dérives, concoctée par Lionel Maurel et Thomas Fourmeux.

Cette semaine, le Copyright Madness revient sur le souci posé par les cartouches d’encre produites par HP, la SACEM macédonienne qui est entrée dans un bras de fer avec le gouvernement et un brevet demandé par Apple tout à fait curieux. Bonne lecture et à la semaine prochaine !

Copyright Madness

Drôle d’impression. Le fabricant de matériel informatique HP vient de frapper fort et décroche sa place dans le Copyright Madness « grâce » au déploiement d’une nouvelle version de son pilote pour les imprimantes. Depuis le 13 septembre, HP interdit aux individus d’utiliser des cartouches non officielles. En effet, l’imprimante est en capacité de reconnaître l’origine des cartouches d’encre. Si ce n’est pas une cartouche officielle, l’imprimante se bloque. Pire, cela peut mettre en défaut l’imprimante elle-même. Bravo à HP pour avoir déployé ce DRM : il a de quoi rassurer les auteurs qui auraient peur d’être contrefaits…

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Blackout. Imaginez que toute la musique d’un pays disparaisse d’un seul coup des chaînes de radio et de télévision. C’est ce qui est en train d’arriver en Macédoine, à cause d’un conflit entre le gouvernement et la SACEM locale. Le ministère de la culture a décidé de donner un agrément à une autre société de gestion collective pour qu’elle puisse gérer les droits des artistes du pays. Cela n’a pas du tout plu à la première société, qui a répliqué en interdisant aux radios et télés de Macédoine de passer la musique de ses 6 000 membres. Les radios ne peuvent même pas combler le vide avec de la musique étrangère, car une loi impose de respecter un quota de 40 % d’artistes locaux. Voilà donc une véritable prise d’otage dans les règles de l’art ! Si vous aimez le son du silence, c’est le moment d’aller visiter la Macédoine…

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Extradition. On va à nouveau parler de chantage mais cette fois c’est au Canada que cela se passe. L’université du Manitoba a reçu des milliers de plaintes de la part de copyright trolls, des sociétés américaines payées par des ayants droit pour menacer des internautes ayant téléchargé des œuvres en vue de les forcer à verser de l’argent pour échapper à un procès. Or l’un de ces trolls, travaillant pour des studios de films pornographiques, n’y va pas de main morte ! En cas de non-paiement immédiat des fortes amendes qui sont réclamées, il menace les étudiants étrangers de les faire radier de l’université et même de les renvoyer dans leur pays d’origine. Tout ceci est complètement fantasmagorique, ces sociétés n’ayant pas le pouvoir d’exercer de telles représailles. Encore un peu et ils menaceront les vilains pirates de leur couper la main…

Argent

CC Negative Space

Trademark Madness

Sécurité. Depuis quelques mois, les administrateurs web ont la possibilité de déployer gratuitement un certificat de sécurité grâce au projet Let’s Encrypt soutenu par l’EFF. L’organisation avait dû faire face à un troll qui revendiquait des droits sur la marque « Let’s Encrypt » alors que cette appellation est utilisée depuis 2014 par le projet. Un juge a tranché et a envoyé le troll dans les cordes. Toutefois, pour éviter que ce genre de dérives ne se reproduise, Let’s Encrypt a déposé la marque. Pour éviter une dilution, l’organisation est obligée d’agir en conséquence. À ce titre, elle a été contrainte, à l’insu de son plein gré, de demander à un développeur qui a écrit un script letsencrypt.sh de le renommer. Ce qui veut dire que tous les projets qui reposent en partie dessus vont utiliser un script dont le nom a changé, ce qui risque de les rendre inopérables. C’est assez dingue de voir comment le système du droit des marques peut provoquer des dommages collatéraux…

Coffre fort

Patent Madness

Pris la main dans le sac. Apple fait partie de nos plus fidèles clients. On retrouve régulièrement dans les colonnes du Copyright Madness la firme de Cupertino. La semaine dernière, Apple était épinglé pour avoir déposé un brevet sur des pots de fleurs (bien que cela concernait plutôt le design de l’objet). Cette fois, Apple a déposé un véritable brevet d’invention… sur un sac en papier ! On se demande bien quelle innovation Apple s’apprête à commercialiser. Apple fait disparaître la prise jack de l’iPhone, mais remet au goût du jour le bon vieux cabas ! Le courage !

Embuscade. La guerre des brevets que se livrent les constructeurs de smartphones devient de plus en plus raffinée. Apple s’est fait condamner cette semaine pour la violation d’un brevet appartenant à une firme nommée Mobile Media Ideas. Ce brevet, bien fumeux, porte sur une méthode permettant de placer le téléphone en mode silencieux et ne pas faire retentir la sonnerie en cas d’appel. Mais Mobile Media est en fait détenu pour partie par Sony et Nokia qui ont envoyé ce patent troll au procès pour ne pas avoir à affronter Apple en première ligne. Apple va y perdre 3 millions de dollars après six années de procès !

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Copyright Wisdom

Sagesse indienne. En Inde, un tribunal a eu l’occasion de rendre un jugement que l’on aimerait pouvoir encadrer. Des éditeurs scientifiques anglais avaient attaqué l’université de Delhi en lui reprochant de réaliser des photocopies d’ouvrages pour les étudiants afin de leur constituer des dossiers de travaux pratiques sans rien reverser aux éditeurs. Le juge saisi de l’affaire a cependant estimé que cette pratique était légale et correspondait à un usage équitable (fair use). Il a même ajouté que le droit d’auteur n’était pas un « droit inévitable, divin ou naturel qui confère aux auteurs une propriété absolue à leurs créateurs ». Voilà une phrase que l’on va répéter à présent comme un mantra !

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Le Copyright Madness vous est offert par :

Lionel Maurel

Thomas Fourmeux

Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !


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