La répétition fait que ça ne peut plus être une simple dérapage linguistique incontrôlé, mais bien l’expression d’un élément de langage étudié. La semaine dernière, invité dans l’Edition Spéciale de Canal+ à l’occasion de l’annonce de la campagne de communication de l’Hadopi, le député UMP Franck Riester avait déclaré que MegaUpload était un site illégal. Une bourde, pensions-nous, puisque MegaUpload n’a jamais été condamné en France et qu’il n’est même pas totalement absurde de penser que la jurisprudence de la cour de cassation devrait s’appliquer favorablement au site d’hébergement de fichiers en cas de poursuites.
« Le problème c’est qu’il y a de l’accès à la culture – par exemple à la musique – gratuitement, mais légal, c’est-à-dire qu’il finance les artistes, notamment par la publicité. Et des offres payantes qui ne sont pas légales, c’est-à-dire qui ne financent pas les artistes. Par exemple MegaUpload, qui est un site de téléchargement illégal. Pour donner aux internautes le sentiment qu’ils sont dans une démarche citoyenne, MegaUpload les fait payer, mais en fait ils ne financent pas la création« , avait expliqué l’ancien rapporteur de la loi Hadopi à l’Assemblée Nationale. Mettant ainsi dans un même sac l’outil et son utilisation.
Ce matin sur France Inter, le député membre du collège de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet a réitéré ses propos. « Vous savez qu’il y a des sites gratuits qui sont légaux, et des sites payants qui sont illégaux comme Megaupload« , a redit Franck Riester à l’antenne de la radio publique. Sauf à croire que sa langue ait dérapé deux fois de suite, il s’agit bien d’une volonté assumée du député de stigmatiser ce site en particulier, quitte à se faire juge à la place du juge :
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Dans un arrêt du 3 mai 2011, la cour d’appel de Paris a elle-même rappelé au sujet notamment de MegaUpload que « l’échange de fichiers contenant des œuvres protégées notamment musicales sans autorisation ne rend pas ces sites en eux-mêmes illicites« , puisque « c’est l’utilisation qui en est faite par ceux qui y déposent des fichiers et les utilisent qui peut devenir illicite« .
Ces sorties médiatiques de Franck Riester ne doivent rien au hasard. Le collège de l’Hadopi a parfaitement conscience que les internautes désertent de plus en plus les réseaux P2P au profit de plateformes de téléchargement direct comme MegaUpload ou de streaming comme MegaVideo. Franck Riester cherche donc à faire passer au grand public le message que MegaUpload n’est pas un site légal, comme peuvent le penser de nombreux Français avertis pour avoir utilisé BitTorrent. Ne pouvant pas avertir les abonnés qui n’utilisent pas de réseaux P2P, l’Hadopi en est réduite à ce genre de communication, au risque de tomber dans la diffamation.
La Haute Autorité avait déjà usé d’une stratégie proche, mais sans citer de plateformes, en affirmant dans ses avertissements que le fait de « consulter » des œuvres sur Internet sans l’autorisation des ayants droit serait illégal et condamné par les tribunaux. Or ça n’est pas vrai, et pour se justifier l’Hadopi nous avait reconnu trahir le droit « dans le souci d’être compréhensible« .
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