Ce lundi, l'Assemblée Nationale examine le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes, défendu par la ministre Najat Vallaud-Belkacem. Entre autres dispositions, le texte offre l'occasion pour le Gouvernement de muscler sa riposte contre les sites internet ayant vocation à dissuader les femmes de pratiquer une interruption volontaire de grossesse (IVG).
En septembre dernier, alerté par un rapport du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, qui déplorait l'excellent référencement sur Google de sites opposés à l'avortement, le Gouvernement avais mis en place un site officiel d'information, IVG.gouv.fr, doté d'une enveloppe de 10 000 euros d'achats de mots clés pour assurer sa visibilité au lancement, avant un relais naturel espéré. "Vous pouvez contribuer à renforcer l’accès à l’information sur ce droit et la visibilité sur Internet du site ivg.gouv.fr en diffusant son adresse sur les réseaux sociaux, en le référençant sur vos sites, en publiant des articles sur vos blogs. C’est grâce à une mobilisation collective et citoyenne que, très vite, ce site neutre et fiable deviendra la première des réponses proposées sur les moteurs de recherche", avait demandé Najat Vallaud-Belkacem.
Mais à l'occasion de l'examen du projet de loi, le Sénat a adopté un amendement déposé par la sénatrice Laurence Rossignol et plusieurs autres élus socialistes, qui est vu aujourd'hui par les anti-IVG comme une tentative de censure de leurs sites sur Internet. Le texte complète en effet les dispositions pénales sanctionnant l'entrave à l'interruption légale de grossesse, pour ne plus condamner uniquement les actions visant à empêcher une femme d'avorter, mais aussi celles qui visent à l'empêcher de s'informer correctement.
IVG.net, toujours 1er sur Google
Tel qu'issu des travaux de la commission des lois de l'Assemblée Nationale, le nouvel article 5 quinquies du projet de loi modifie le code de la santé publique pour dire que le fait de "de tenter d'empêcher de pratiquer ou de s’informer sur une interruption de grossesse ou les actes préalables" est puni de 2 ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende. Sont notamment visées les "pressions morales et psychologiques" qui viseraient à dissuader une femme d'avorter.
Réunis dimanche à Paris, où ils étaient entre 16 000 et 40 000 manifestants, plusieurs opposants au droit à l'avortement ont estimé que cette disposition avait pour but implicite de faire condamner les sites internet qui concurrencent le nouveau site officiel IVG.gouv.fr. Serait particulièrement visé le site IVG.net, qui sous des allures de site institutionnel, avec affichage du numéro Vert d'un prétendu "Centre de documentation médicale sur l'avortement", cache en réalité un site farouchement opposé à l'avortement, qui tente de culpabiliser les femmes qui veulent faire pratiquer une IVG. "On m'a demandé: ‘n'y a-t-il pas une petite voix au fond de vous qui vous dit que vous voulez garder votre enfant ?", avait par exemple témoigné l'une de ces femmes, tandis que de nombreuses autres font état de pratiques de quasi harcèlement une fois le "centre" contacté.
Aujourd'hui encore, IVG.net apparaît en tête des résultats de Google, malgré les souhaits de Najat Vallaud-Belkacem. Si le projet de loi est adopté en l'état, son éditeur pourra certainement être condamné pour entrave à l'information sur l'IVG, qui est sous-entendue comme une information "libre et éclairée".
En revanche, il paraît peu probable que le texte puisse s'appliquer à l'ensemble des sites anti-IVG, en particulier à ceux qui s'affichent clairement comme tels et ne se cachent pas derrière des apparences institutionnelles pour attirer les femmes, avant de les faire douter.
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