Le modèle de vente au titre imposé par iTunes fait craindre aux maisons de disque la fin de l’album. Quelles conséquences pour la création musicale ?

A l’heure du MP3 la notion d’album est sans cesse remise en cause. Avec le CD, les maisons de disque vendaient un ensemble de titres, ou des singles préalablement choisis pour mieux promouvoir cet ensemble. Mais depuis toujours Apple, qui fait la pluie et le beau temps concernant la musique numérique, refuse aux labels le luxe de proposer des packaging de titres. Cela a même poussé certains artistes, comme Jay-Z, à quitter la plateforme, refusant de voir dépecer son travail en une série de titres isolés.

D’abord vu comme un avantage offert aux consommateurs – pouvoir obtenir le morceau qu’ils veulent sans acheter l’album complet – la consommation au titre a fini par inquiéter les maisons de disque. « Je vais me faire descendre par les bloggeurs en disant ça mais je pense que le problème avec l’iPod, c’est son modèle de single » a expliqué Howard Stringer, le PDG de Sony (qui n’a pas l’air de craindre les foudres de notre cher Vendangeur Masqué sur le forum ;-). « Conserver la qualité de la musique et le travail des directeurs artistiques est impératif. La disparition de l’album est une chose qui m’inquiète, mais peut être me fais-je vieux. »

De nombreux artistes considèrent en effet que l’album n’est pas qu’une simple compilation de titres, mais un travail dont la cohérence ne se juge qu’à l’aune du travail complet. Et si le directeur artistique perd de son intérêt, c’est justement parce que son rôle est de transformer les titres d’un groupe en un véritable projet global. Alors, les artistes doivent-ils suivre l’exemple de Manu Chao, qui compte proposer des cartes postales sonores au lieu de sortir des albums ? Doivent-ils reconsidérer leur rapport avec la musique enregistrée, ou considérer cette nouvelle donne comme une simple libertée offerte au consommateur ne méritant pas d’influencer leur travail ?

Car, projet ou non, on s’est déjà tous retrouvé face à un album dont l’on apprécie un ou deux titres mais pas l’ensemble, nous exposant ainsi à un choix manichéen : acheter l’album ou passer son chemin. Avec le MP3, ces considérations ont disparues. Comme le passage du vinyle au CD a pu changer les mentalisations du format standard d’album des artistes, quelle sera l’impact du MP3 sur la création ? Entraînera-t-il les artistes à abandonner l’expérimentation au profit d’une production uniquement faite de « tubes » potentiellement transformables en sonneries pour potable ? Changera-t-il la durée standard d’un album voire même faire totalement disparaître cette notion ? Comment envisager le studio si ce n’est que pour enregistrer un titre ? De nombreuses questions restent encore en suspens.

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