Chaque samedi, c’est la compilation de l’actualité de la propriété intellectuelle et de ses dérives, concoctée par Lionel Maurel et Thomas Fourmeux.

Cette semaine, le Copyright Madness revient sur la décision de la cour de justice de l’Union européenne sur le lien hypertexte, Michel Houellebecq qui a un peu trop espéré en ses chances et une curieuse affaire concernant une marque liée à une autoroute aux États-Unis. Bonne lecture et à la semaine prochaine !

Copyright Madness

Ivre, il se retire du web. Ce n’est pas la première fois que cela arrive mais cela nous impressionne toujours autant. Une entreprise travaillant pour le compte de Warner Bros, chargée de signaler les sites qui s’adonnent à la contrefaçon a demandé à Google de déréférencer certaines URL. Or dans le lot, on dénombre des pages dont le nom de domaine est warnerbros.com ! Cette erreur est arrivée parce que l’adresse de la page contenait Dark Knight et le robot de la société a cru qu’il s’agissait d’un lien illégal pour télécharger le film sur Batman. À force de faire confiance aux robocopyrights, on finit nécessairement par causer des dommages collatéraux.

Dark Knight

Un lien vaut mieux que deux tu l’auras. La cour de justice de l’Union européenne vient de rendre une décision lourde de conséquences dans le cadre de l’affaire qui opposait le site GS Media BV et Playboy. Dans cet arrêt GS Media BV, la cour a décidé qu’un lien hypertexte qui pointait vers un contenu protégé déjà en mis en ligne pouvait représenter une infraction au droit d’auteur. Cette décision fragilise l’essence même du web dont le fonctionnement repose sur les liens hypertextes. Désormais, pour être véritablement sûr de ne pas commettre une infraction, il faudra demander l’avis aux titulaires de droits. Autrement dit, ce n’est absolument pas envisageable ! Cette décision couplée à la volonté de la Commission de généraliser le filtrage des contenus sur le web annonce des heures peu joyeuses…

Mauvais joueur. Nintendo a encore frappé et c’est la deuxième fois en quelques semaines. Le célèbre éditeur de jeux vidéo vient de réclamer le retrait de plus de 500 jeux sur la plateforme Game Jolt. Les jeux incriminés ont été développés par des fans, réutilisant des personnages qui relèvent de la propriété de Nintendo. Game Jolt affiche des bannières publicitaires et Nintendo considère qu’il y a une rémunération qui est faite sur son dos. L’éditeur a naturellement invoqué le Digital Millenium Copyright Act pour que la plateforme cède et retire les jeux. N’ayant pas les ressources suffisantes pour affronter le géant japonais, la plateforme s’est exécutée. Au lieu d’y voir une forme de reconnaissance, Nintendo a fait le choix de la chasse acharnée au détriment des usages créatifs…

Plumitif. Nous avons le grand plaisir d’accueillir dans le Copyright Madness l’écrivain Michel Houellebecq, qui nous a bien fait rire. Il a perdu cette semaine un procès contre le journal Le Monde à qui il reprochait d’avoir révélé le texte d’un message écrit sur un petit papier, communiqué à son avocat à l’occasion d’une audience : « Ma décision est irrévocable : les médias, pour moi, c’est fini ». L’avocat de Houellebecq a essayé de plaider la violation du droit d’auteur, mais les juges ont répondu en rappelant qu’être écrivain ne signifie pas que tout ce que l’on écrit est original ! Cette simple phrase n’est pas protégeable par le droit d’auteur et Houellebecq a pondu un petit morceau de domaine public en l’écrivant !

Trademark Madness

Contre-attaque. En Suède, un « copyright troll » a commencé à sévir. Il s’agit d’un cabinet d’avocat du nom de Spridningskollen qui agit pour les ayants droit et menace des internautes surpris à télécharger en exigeant le paiement d’une amende de 200 dollars sous peine de procès. Mais le fournisseur d’accès internet Bahnhof a décidé de monter au créneau pour protéger ses clients. Il a déposé une marque Spridningskollen et l’attaque en demandant la fermeture de son site. Moralité : on trouve toujours plus troll que soi !

internet-2000

Highway to Hell. Aux États-Unis, l’autoroute M22 qui traverse le Michigan fait partie de ces grandes routes mythiques, à l’image de la route 66. À cause de cette popularité, l’État du Michigan subit plusieurs désagréments, comme le vol régulier de panneaux de signalisation. Mais il a décidé d’agir contre une autre sorte de vol, en attaquant en justice une entreprise qui a déposé la marque « M22 ». L’État fait valoir que le nom et le logo de l’autoroute sont dans le domaine public et que nul ne peut se les approprier. De beaux principes, mais la route risque d’être encore longue avant qu’ils soient respectés !

Patent Madness

Six d’un coup. Aux États-Unis, la société Uniloc a décidé de frapper fort. Elle attaque en justice six grandes firmes fabriquant des smartphones pour violation de brevet : HTC, LG, Motorola, Huawei, ZTE et Kyocera. Elle les accusent d’utiliser une technologie d’envoi de messages par un système de VoIP. Uniloc est en réalité une grande habituée des prétoires et possède un riche portefeuille de brevets qu’elle utilise uniquement pour faire des procès. Encore un patent troll, comme on en croise chaque semaine ou presque dans cette chronique…

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Lionel Maurel

Thomas Fourmeux

Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !

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